Une société capitaliste révoltante

A l’aéroport de Bierset, à Liège, les travailleurs de FedEx sont en colère contre la plus grande multinationale de transport de fret aérien qui prétend licencier la moitié d’entre eux et imposer aux autres des contrats de 20 heures semaine, contre 30 heures actuellement. 20 heures ! Avec un salaire si écrasé, on est forcé d’accepter tous les rappels, n’importe quand, en laissant les enfants se débrouiller seuls ! Ces travailleurs ultra-flexibles sont aussi ultra-rentables : FedEx a engrangé l’année dernière un bénéfice de 1,37 milliards €.

Mais ce n’est jamais assez. Car les FedEx, Amazon, Alibaba et autres géants de la distribution se livrent à une véritable guerre économique pour rafler les profits d’un secteur en pleine croissance, en remplacement des magasins traditionnels et de la Poste.

Ces trésors de guerre, accumulés sur l’exploitation des uns et le chômage des autres, contournent l’impôt en filant directement vers les paradis fiscaux. Comme celui du Grand-Duché de Luxembourg, à 10 minutes de vol de Bierset. Selon une enquête de grands journaux, quelques 140 000 filiales d’entreprises étrangères – qui n’y ont souvent qu’une boite aux lettres – y ont déposé au total 6 500 milliards € ! L’équivalent du total de la richesse annuelle créée en Allemagne, en France et en Belgique ! Et cela pour le seul Grand-Duché !

On est étourdi par de telles sommes qui permettraient de construire des centaines d’écoles, d’hôpitaux, de gares, et de rémunérer des millions d’emplois nécessaires aux besoins de la société !

Au contraire, que constatent les travailleurs qui endurent tant de sacrifices pour faire vivre leurs familles, payer les études des enfants ? Dans les couloirs des hautes écoles et des universités, des centaines d’étudiants de familles populaires font la file pour recevoir un colis alimentaire. Ces étudiants dépendent financièrement des petits boulots qu’ils mènent de front avec leurs études et le confinement révèle brutalement la précarité de leur situation.

La précarité, c’est du reste le seul avenir que leur propose la société capitaliste. Oui, l’avenir est noir pour la jeunesse ! Et pas seulement à cause du manque de contacts sociaux. Car si la technologie et la science médicale nous protègeront petit à petit du coronavirus, elles ne peuvent rien contre l’accroissement des injustices, l’enrichissement scandaleux d’une petite minorité de capitalistes, au milieu de l’appauvrissement du plus grand nombre.

Cette situation pousse les États à des méthodes de plus en plus autoritaires pour protéger l’enrichissement des exploiteurs. A Madrid, des centaines de jeunes espagnols manifestent pour protester contre l’arrestation et l’emprisonnement d’un chanteur de rap dont «le crime» est d’avoir exprimé sur twitter son opinion sur le roi (fraudeur fiscal, amis des dictateurs) et sur les violences policières.

Comment ne pas partager ces sentiments de révolte, lorsque l’on voit le laxisme, la complicité des États envers les riches et de l’autre, la brutalité croissante envers les pauvres et les travailleurs ?

Et il n’y a pas que la brutalité de la police. Actiris, le Forem et le VDAB continuent de sanctionner et de priver des chômeurs de leurs indemnités, tandis que des dizaines de milliers de salariés licenciés se retrouvent à rechercher un emploi qui existe de moins en moins ! C’est là un des aspects de la guerre que mènent patrons et dirigeants politiques contre les travailleurs. Aux multinationales, les terrains gratuits, les subsides, les politiques fiscales archi-accommodantes, aux ouvriers le blocage des salaires, le chômage et toutes les pressions pour accepter les conditions des patrons.

La colère qui s’accumule dans les différents secteurs de la société deviendra une force libératrice lorsque les travailleurs s’opposeront collectivement aux capitalistes et gouvernements à leur service. Pour empêcher les licenciements, créer les emplois utiles pour mettre fin au chômage, imposer les augmentations de salaires et de pensions nécessaires face aux hausses des loyers et des prix. Et puis, plus fondamentalement, les travailleurs auront à renverser le capitalisme incapable d’éviter les crises, la spéculation, les guerres et même de protéger l’humanité d’un virus !

Mais il faut aux travailleurs des organisations, de véritables syndicats, de véritables partis politiques ouvriers pour rassembler leurs forces par-dessus les frontières, comme le font les capitalistes. À l’époque du télégraphe et des trains à vapeur les travailleurs avaient réussi à créer de telles organisations, ce n’est pas du tout au-dessus des forces des travailleurs qui vivent maintenant à l’époque d’internet et des aéroports.