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Les capitalistes entraînent toute la société dans la crise, il faut les renverser ! 

En pleine période de chômage économique et juste avant les vacances, la direction d’Audi a annoncé la fermeture de l’usine de Forest (Bruxelles). Les 3.000 travailleuses et travailleurs sont menacés de se retrouver au chômage d’ici quelques semaines ou mois, ainsi que celles et ceux des cinq sous-traitants qui dépendent directement de l’activité de l’usine. 

Depuis des mois, les licenciements d’intérimaires et de travailleurs malades se succédaient, ainsi que les semaines de chômage économique. L’annonce de la fermeture n’est pas une surprise.

Mais ça n’en reste pas moins un coup de massue supplémentaire pour les travailleurs de l’usine et le monde du travail dans son ensemble ! Car cette annonce survient après les licenciements chez Van Hool, Callebaut, Ontex et bien d’autres. Au cours des six premiers mois de 2024, donc sans compter Audi, 46 entreprises ont annoncé des licenciements collectifs, plus de 4.500 au total !

Ces licenciements découlent directement des choix des actionnaires, des banques et des grandes entreprises et aussi des décisions des propriétaires et patrons des plus petites. 

En augmentant les prix, notamment du gaz, de l’électricité, des carburants, des loyers et de l’alimentaire, et en bloquant les salaires, les capitalistes et la grande bourgeoisie s’en sont mis plein les poches au détriment de l’ensemble des travailleurs. 

Ainsi le groupe Volkswagen, dont Audi fait partie, a engrangé 17,9 milliards de bénéfices nets pour 2023, un record ! Les salariés de VW-Audi ont été obligés de se serrer la ceinture, les clients ont payé plus cher leur voiture, les actionnaires de VW-Audi se sont enrichis, mais ces milliards manquent pour payer les loyers et le chauffage. Et rénover son logement, aller au cinéma ou au restaurant, payer des vacances aux enfants, beaucoup de gens ont déjà dû faire une croix dessus…

Résultat de cet accaparement des richesses par une minorité de millionnaires et milliardaires, celles et ceux qui n’ont qu’un salaire ou qu’une allocation pour vivre se retrouvent dans le rouge de plus en plus tôt au cours du mois. Et même les cadres, ou les professions libérales qui gagnent suffisamment pour s’acheter une Q8 à 100.000 euros y regardent à deux fois car l’avenir économique est sombre.

Les perspectives de vente dans l’automobile comme dans d’autres secteurs s’assombrissent. Mais ce n’est pas à cause des salaires trop élevés en Belgique, ni à cause de l’Europe qui imposerait des normes trop strictes, ni de la concurrence chinoise, ou d’autres faux prétextes inventés par la bourgeoisie et les journalistes à son service.

La cause principale de la crise dans l’automobile comme dans les autres secteurs de l’économie est due à ce qu’une minorité de très riches accaparent de plus en plus les richesses créées par les travailleurs et que l’ensemble de la population a tendance à s’appauvrir et à consommer moins ! Alors les patrons et les capitalistes licencient et ferment des entreprises, aggravant encore la crise. Ainsi, avec la fermeture d’Audi Bruxelles, tous les commerces des environs vont être impactés. 

Entre janvier et mai 2024, il y a eu plus de 12.000 pertes d’emplois pour faillite : 1.000 dans la construction, 2.000 dans le commerce, 3.000 dans l’Horeca. Sans parler de toutes les sociétés individuelles qui disparaissent.

A cause des riches qui payent peu ou pas d’impôts, des cadeaux fiscaux aux capitalistes, des dépenses d’armement, les gouvernements et les communes sont déficitaires… et font comme les patrons, suppriment des emplois, licencient. 

Mais plus la crise économique s’aggrave, plus les tensions augmentent au sein de chaque pays et entre les pays. Les gouvernements justifient alors le manque de logements sociaux et les coupes budgétaires avec le prétexte « qu’il n’y a pas assez pour tout le monde », en pointant les immigrés, les étrangers… Les politiciens entretiennent le régionalisme, le nationalisme, la xénophobie, voire le racisme, pour éviter de dénoncer les vrais responsables de la crise, les actionnaires, les millionnaires et milliardaires. Ils construisent ainsi un tremplin pour l’extrême droite qui se développe partout en Europe et dans le monde. Mais l’extrême droite n’a pas de solution face à la crise ! Elle attise encore plus les divisions entre les travailleurs et en faisant passer les immigrés comme responsables de la crise, elle dirige la colère des travailleurs dans une impasse.

Alors aidons tout ceux autour de nous à ne plus croire aux illusions, aux promesses et aux sauveurs suprêmes. Il va falloir que les travailleurs unissent leurs forces pour faire payer les capitalistes, pour interdire les licenciements et partager le travail qui reste, payer des salaires et des pensions décents à tous. Et finalement il faudra renverser ce capitalisme qui nous entraîne vers la misère, les divisions et les guerres.

Actualités

Audi : pour se défendre, les travailleurs ne peuvent compter que sur eux-mêmes !

Mardi 9 juillet, alors que les travailleurs avaient quitté l’usine pour deux semaines de chômage suivies des congés annuels, la direction d’Audi a annoncé la fermeture en trois phases, avec 1.500 licenciements prévus dès septembre, jusqu’à probablement fermer pour fin 2025. C’est la préparation de la « procédure Renault » dont la phase 1 prévoit « d’explorer toutes les possibilités pour un maintien de l’entreprise ».

Les syndicats ont à peine fait passer le message, sans appeler à la moindre action. Les travailleurs eux-mêmes ont pris l’initiative de venir devant l’usine. Dès la nuit suivant l’annonce, quelques-uns sont arrivés et ont pu constater que la direction avait fait cadenasser l’usine, faisant monter la garde à des vigiles avec des chiens… et même armés !

Mais s’il n’y a pas de rentrée le 20 août ? Et comment faire pour être prêts à réagir quand la direction va commencer les licenciements, sans prime peut-être ! Déjà actuellement, des travailleurs reçoivent un mail leur signifiant leur licenciement pour avoir été trop souvent malades au goût de la direction !

Certains travailleurs sont convaincus qu’il ne faut pas attendre. Et ils l’ont fait savoir aux syndicats… qui ont répondu qu’ils devaient « faire confiance à leurs représentants élus ». Pour beaucoup de travailleurs, cette confiance est rompue. Cela fait des mois que les délégués les baladent, certains mentant éhontément. Et cela alors que la direction licenciait les intérimaires, renvoyait les anciens sur les postes les plus durs, et que tout le monde sentait que quelque chose se tramait !

Globalement, les travailleurs continuent à attendre des initiatives des syndicats. Mais il y a des travailleurs qui ont commencé à se rassembler devant l’usine et qui discutent de tous les problèmes. Faire quoi, avec qui ? Avec quelles revendications ? Comment construire un rapport de force, alors que l’usine ne tourne plus ? Comment s’organiser ?

Les semaines qui viennent peuvent permettre devant l’usine une discussion permanente façon camping (« vu que les vacances sont foutues de toute façon, on les passera ici », disait un ouvrier). C’est de là que peuvent jaillir et les idées d’action et les moyens de les réaliser.

En dépassant la simple colère contre les syndicats – qui devraient faire, mais ne font pas – en prenant en main les choses eux-mêmes, les travailleurs peuvent trouver les réponses à bien des questions, et constater qu’ils sont capables de s’organiser.

C’est des salaires et des existences des ouvriers qu’il s’agit, c’est eux qui doivent décider !

Paroles de travailleurs

Un jeune travailleur du montage : « Je ne veux pas de prime. Je veux garder mon emploi. Je suis venu travailler avec 39 de fièvre, j’ai été opéré du dos, et j’ai travaillé quand même. J’ai souffert pour avoir ce travail. Je ne veux pas devoir recommencer tout ça encore une fois ! Où est De Croo, où sont tous les politiciens qui ont dit qu’ils voulaient sauver l’usine ?! Qu’ils viennent un peu ici s’expliquer. Mais ils n’ont rien à faire de nous. Qu’ils essayent de faire le travail que j’ai fait ! Leur usine, leurs bagnoles, c’est nous qui les avons fabriquées. C’est nous leurs milliards ! Ils nous doivent ça ! »

Des ouvrières d’Impérial, sous-traitant d’Audi : « Ces derniers jours, chacune de nous faisait 4 postes ! On a travaillé, tu ne peux pas t’imaginer. Et maintenant, on ne sait même pas si ces jours vont même être payés. Parce qu’Imperial va peut-être faire faillite. »

Un ouvrier dans une discussion sur les primes : « Il n’y a pas que l’ancienneté, il y a toute la souffrance du travail à la chaîne, notre santé physique et mentale. Il faut leur mettre tout ça sur la facture. »

Un ouvrier du montage : « Ils m’ont pris ma santé. Ils veulent me prendre ma dignité. Ils n’auront pas ma dignité. Il faut se battre ! »

Un ouvrier de logistique : « Oui, sans doute, ça va être difficile de se battre. Ils ont décidé de fermer, ça va être comme ça. Mais il faut venir, il faut garder la tête haute. »

Les problèmes qui se posent :

Pourquoi ils ferment ?

C’est la question que beaucoup se posent. Et les tentatives d’explication vont bon train : à cause de l’Europe qui a supprimé les subventions à l’achat d’une voiture électrique, à cause de la Chine qui fait de meilleures voitures, moins chères. C’est l’électrique le problème. Ils auraient dû rester (ou revenir) aux moteurs thermiques. Certains disent même qu’il y avait quand même eu trop de malades. C’est normal que le patron ne veuille pas payer tous ces gens. Ou encore que les syndicats ont trop demandé.

Qu’une poignée d’actionnaires qui empochent des milliards chaque année décide de fermer une usine et envoyer des milliers de travailleurs et leurs familles dans la misère et la détresse, parce que ces milliardaires en veulent encore plus, c’est en effet difficile à concevoir. C’est pourtant ce qui se passe !

Sauver l’usine ou sauver nos vies ?

Beaucoup de travailleurs espèrent une prime et sont en train de calculer quel montant ils seraient prêts à accepter. Souvent, des militants syndicaux et aussi d’autres travailleurs leur répondent qu’il ne faut pas être « égoïste », pas penser seulement à l’argent, mais qu’il faut sauver l’outil ! Un travailleur répond : « mais à quel prix ? Ils vont nous imposer de travailler encore plus. Tu peux supporter ça ? Moi non ! Ce n’est pas pour l’usine qu’il faut se battre, mais pour nous. Ceux qui veulent une prime, doivent avoir une prime, et ceux qui veulent garder un travail avec un salaire, doivent avoir un travail. Ici ou ailleurs. »

Comment se battre, alors que les voitures qu’on fabrique ne se vendent pas ?

« On n’a pas de moyen de pression économique, la grève ne sert à rien ». Mais ce que craignent les patrons d’Audi et de tout le pays, ce n’est pas quelques voitures non produites. Ce qu’ils craignent c’est la révolte contagieuse qui pourrait partir des travailleurs d’une grande entreprise, située dans la capitale, qui plus est. Dans les discussions, on évoque Volvo où les ouvriers vivent la même chose ou presque, il y a l’épouse qui travaille à l’hôpital ou chez Delhaize et où ça ne va pas non plus. En fait, ça ne va nulle part pour les travailleurs. Il faudrait qu’on se mette tous ensemble. Et si on le décide, on peut le faire.

Faut-il attendre les négociations, respecter la procédure ?

La direction ne respecte rien depuis le début. Même pas ses propres engagements. Les procédures ne servent qu’à temporiser, pour toujours agiter une petite carotte devant le nez des travailleurs. Des négociations, il n’en sortira rien qui vaille sans rapport de force !

A quoi ça sert de venir devant l’usine, si on ne fait rien ?

Un ouvrier : « il faut venir, déjà pour ne pas être seuls. C’est ici qu’on voit les camarades. A la maison, je deviendrais fou. » Et on peut ajouter : et c’est ici qu’on peut discuter ensemble de tous ces problèmes et trouver des pistes d’action ensemble.