Sabine enfin libre et régularisée

Sabine Amiyeme était privée de liberté depuis le 2 octobre 2024. Détenue dans le centre fermé de Holsbeek, elle risquait une expulsion forcée vers son pays d’origine, le Cameroun.

Comme d’autres jeunes camerounaises, pour fuir le Cameroun et trouver un moyen de gagner sa vie, Sabine est passée par les services d’une agence légale, ayant pignon sur rue, qui recrute du personnel domestique pour des familles libanaises. Arrivée au Liban, comme souvent, la famille lui confisque son passeport et la place dans une situation de semi-esclavage : pas d’horaire de travail, une disponibilité absolue, des salaires mystérieusement réduits en raison de prétendues dettes. Il a fallu deux ans pour que Sabine trouve le moyen de s’échapper. Elle a dû parcourir la Turquie et la Grèce pour finalement arriver en Belgique en 2011.

A force de travailler douze à treize heures par jour comme coiffeuse dans le quartier de Matonge à Ixelles, elle finit par pouvoir ouvrir son propre salon de coiffure à Liège. Elle engage deux employées. Elle ouvre un restaurant. Elle a un numéro d’entreprise et paie ses cotisations à l’ONSS. A plusieurs reprises, elle effectue une demande de régularisation de sa situation auprès de l’Office des étrangers. C’est un refus à chaque fois. L’administration prend à peine le temps d’argumenter.

Le mercredi 2 octobre 2024, cette vie patiemment reconstruite a basculé. La police est venue chercher Sabine et l’a emmenée au centre fermé de Holsbeek, près de Louvain, où sont enfermées des femmes « sans papiers » dans l’attente d’une expulsion. Le 15 octobre, elle est emmenée menottée à l’aéroport pour une première tentative d’expulsion forcée. Sabine résiste et on la ramène vers le centre fermé de Holsbeek. Pour la faire craquer et l’amener à donner son accord pour une « expulsion volontaire », son accès à internet et au téléphone est réduit davantage, afin de rendre plus difficile le contact vers l’extérieur où une campagne de solidarité est en train de se mettre en place.

Sabine était connue. Le documentaire « Chez Jolie Coiffure », diffusé en 2018, montrait sa vie et celle d’autres femmes dans un salon de coiffure à Ixelles. Ses amis organisent des projections du film pour mettre en lumière l’absurdité de sa situation et collecter des fonds pour sa défense.

Les collectifs liégeois luttant pour les droits des sans papiers mobilisent de leur côté. Une pétition recueille plus de 6.000 signatures.

Plusieurs manifestations sont organisées devant les tribunaux où comparait Sabine. Différentes procédures judiciaires sont engagées. Sabine introduit un dossier pour obtenir le statut de réfugiée. Par ailleurs, elle demande sa libération du centre fermé.

Le 24 décembre, la chambre du conseil de Liège ordonne à l’Office des étrangers de libérer Sabine. L’Office des étrangers fait immédiatement appel et, le 8 janvier, la chambre des mises en accusation décide de prolonger la détention de Sabine qui entame son quatrième mois de privation de liberté.

Grâce à la mobilisation de quatre mois qui commence à intéresser les médias, l’office finit par lui accorder le statut de réfugiée le 27 janvier 2025. Sabine va pouvoir enfin continuer sa vie en Belgique mais cette fois-ci légalement.