Le premier ministre Yves Leterme a beau avoir le cynisme d’affirmer que « la Belgique se sort mieux de la crise que d’autres pays« , l’année 2010 commence sous le signe du chômage pour des centaines de milliers de travailleurs dans le pays.
Oui, il paraît que la première semaine à la Bourse a été excellente, mais chez Opel, Inbev, Janssen, les banques, la Sonaca, B-Cargo… et dans combien d’autres entreprises plus petites, la vie des travailleurs et de leurs familles est en train de basculer, sans que les journaux et la télévision en parlent?
En Flandre, le chômage a augmenté de 23% en un an, un triste record, et tous les commentateurs s’accordent pour pronostiquer que l’année 2010 sera pire.
Le gouvernement, les syndicats, et très hypocritement le patronat, s’accordent pour dire que si l’augmentation du chômage n’a pas été encore plus marquée, c’est grâce au système de chômage économique. C’est sans doute vrai, mais pour les grandes entreprises, ce système permet depuis plus d’un an de faire supporter le coût salarial aux caisses de chômage, et finalement à l’ensemble des travailleurs. Car ce sont les cotisations des travailleurs qui alimentent les caisses de chômage, et c’est encore eux qui supportent des baisses de revenus depuis des mois.
Cela n’a pas empêché les patrons de jeter comme des kleenex des dizaines de milliers d’intérimaires et de CDD, de laisser sur le carreau des dizaines de milliers de jeunes à la recherche de leur premier emploi. Et l’institution du chômage économique n’empêchera pas les patrons de licencier les CDI pour faire peser le travail sur moins de travailleurs et faire ainsi des profits malgré la stagnation des ventes.
Et dans les grandes entreprises, imposer aux travailleurs de vivre avec 300 euros (ou plus) de réduction de salaire mensuel, ne les a pas empêché de continuer à distribuer des dividendes aux actionnaires et diverses primes dorées aux dirigeants.
Quant au gouvernement, concernant le chômage, il ne fait que prolonger cette facilité accordée au patronat. Et il sert de prétexte pour distribuer d’autres cadeaux aux patrons. Ainsi, dorénavant, lors de l’embauche d’un jeune, 1 000 euros de son salaire seront payés par le chômage. Les patrons qui ne prévoient pas d’embaucher, n’embaucheront pas pour autant. Les autres, comme Audi par exemple, qui envisage peut-être d’embaucher 400 personnes pour le lancement de son nouveau modèle, profiteront d’une main d’œuvre très bon marché, alors qu’ils auraient tout à fait les moyens de payer des salaires « normaux ». Et ils ne seront même pas obligés d’embaucher sous contrat CDI!
La ministre de l’emploi, Joëlle Milquet, a le culot d’appeler cela une mesure anti-crise « en faveur des travailleurs ».
Des mesures anti-crise « en faveur des travailleurs », il n’y en a pas eu! Depuis le début de la crise, ce sont les travailleurs seuls qui en supportent les conséquences catastrophiques.
Pour les banques et les entreprises, des milliards ont été mobilisés et continuent à être mobilisés dans les trois régions, au point que les économies d’années d’austérité ont été anéanties en quelques mois et que la dette s’envole à nouveau. Avec comme conséquence des nouvelles restrictions budgétaires dans l’enseignement, dans les transports en commun, dans tout ce qui est utile à la collectivité, sans parler des menaces sur les retraites déjà misérables et les soins de santé déjà inaccessibles pour beaucoup.
Toutes ces mesures, au niveau des entreprises comme au niveau de l’Etat, ne visent qu’à rétablir le profit, sur le dos des travailleurs. « Sortir de la crise », dans la bouche du monde patronal, cela signifie simplement augmenter l’exploitation, quitte à voir revenir la misère ouvrière du passé, et faire payer la collectivité quitte à ce que les Etats ne sachent plus remplir les tâches essentielles pour le fonctionnement de la société.
Pour le monde du travail, il s’agit de se préparer à parer les nouveaux coups qui se préparent. Et la première revendication, essentielle, est celle de partager le travail entre tous, sans baisse de salaire, en prenant sur les profits des gros actionnaires. La seconde revendication, c’est de pouvoir contrôler les comptes des banques et des entreprises, de lever l’opacité de leurs finances qui permet les spéculations les plus folles et prépare des crises encore plus graves.
Et les travailleurs ont le moyen d’inverser le cours des choses, eux qui produisent tout, eux qui font fonctionner toute la machine économique, pour peu qu’ils prennent conscience de la force qu’ils représentent.
C’est le seul vœu raisonnable que l’on puisse formuler pour cette nouvelle année: qu’une légitime et sainte colère s’empare des travailleurs et leur permette d’imposer aux industriels et aux banquiers de supporter les conséquences de leur système économique dément.