Libye : le brigandage qui se proclame humanitaire

Cela fait dix jours que des avions français, britanniques, américains et belges bombardent la Libye. Les grandes puissances coalisées prétendent que c’est pour venir au secours de la population libyenne, victime des violences de son dictateur, Kadhafi. Mais il faut être bien naïf pour croire les dirigeants de ces grandes puissances. Tout au long de leur histoire, elles ont mené leurs guerres, leurs interventions militaires et commis les pires atrocités en invoquant la démocratie, la liberté, la civilisation, et jamais leurs véritables raisons : le pillage et l’exploitation.

Kadhafi est certes une crapule, dictateur de son peuple. Ses quarante ans de règne sur la Libye, c’est le règne de l’arbitraire, de l’absence de libertés démocratiques, le musellement de toute opposition, les arrestations pour délit d’opinion, les tortures. Mais à crapule, crapule et demie. Les grandes puissances ont un bilan bien plus sordide car multiplié par le nombre de pays qu’elles tenaient ou qu’elles tiennent encore sous leur domination.

Pour ce qui est de la Belgique, son pouvoir colonial au Congo n’a jamais été démocratique. La population noire n’avait aucun droit. Et quand elle s’est révoltée, les services de l’Etat belge ont joué un rôle majeur dans l’assassinat du leader nationaliste Lumumba. Son crime avait été de vouloir des libertés et la démocratie pour son peuple… Ce passé n’est pas si lointain pour qu’il soit oublié.

Et depuis que la domination coloniale directe a cessé, cela a continué par dictateurs locaux interposés, imposés, soutenus, armés par les impérialismes. Le soutien de la Belgique à Mobutu était longtemps infaillible, notamment quand il s’agissait de lui donner les moyens d’écraser les révoltes dans son pays. Mobutu était l’équivalent de Kadhafi.

Kadhafi lui-même a été pendant longtemps un allié des gouvernements belge et français. Encore en 2004, il fut accueilli somptueusement à Bruxelles par l’Union européenne et Guy Verhofstadt en personne, sa tente plantée dans le parc du château de Val-Duchesse. Et une partie des armes avec lesquelles il combat le peuple insurgé dans son pays, lui ont été vendues par la FN Herstal et d’autres.

Maintenant que le vent tourne dans les pays arabes, la France comme les autres grandes puissances, et la Belgique dans leur sillage, se débarrassent de leurs créatures ou de leurs alliés devenus encombrants et inutiles.

Mais comme dans le passé, elles n’ont rien à faire des peuples et de leur vie. Ce qui les intéresse dans le cas de la Libye, c’est le pétrole, c’est le gaz, qui enrichissent les trusts du pétrole dont Total, et les commandes d’avions et d’armes qui enrichissent Dassault qui possède aussi la SABCA en Belgique, et d’autres.

Les insurgés de Benghazi croient mourir pour la liberté mais, au mieux, ils auront un régime vaguement parlementaire, sans liberté pour les classes pauvres. Ils croient aussi, à en juger par les déclarations de certains devant les caméras de télévision, que les revenus du pétrole seront un peu mieux répartis et pas engrangés par le seul clan de Kadhafi. Mais les profits du pétrole continueront à être encaissés par les multinationales du pétrole, et les classes pauvres resteront pauvres.

Parallèlement à l’action des armes, commence la diplomatie. Les grandes puissances se réunissent pour discuter de l’avenir de la Libye. Elles chercheront peut-être à pousser Kadhafi dehors, mais ce n’est même pas dit.

Que Kadhafi parte, personne ne le regrettera, hormis son clan. Mais les marchandages qui s’ouvriront concerneront surtout les grands trusts du pétrole et leurs accès respectifs aux ressources libyennes ou encore la part des groupes capitalistes des différentes puissances sur le marché libyen, celui des armes comme celui de la reconstruction de ce que les avions sont en train de détruire. Le sort du peuple libyen ne les intéresse pas plus que celui des autres peuples n’intéresse les dirigeants des grandes puissances lorsqu’elles décident de leur devenir.

Les travailleurs n’ont en tout cas pas à se sentir solidaires de l’aventure militaire de leur bourgeoisie, ni des marchandages diplomatiques entre brigands pour partager le butin. Une guerre de brigandage reste une guerre de brigandage, même si on la présente comme une action humanitaire.

Arrêt immédiat des bombardements sur la Libye ! Armée belge, hors de la Libye et hors d’Afghanistan !