Les contradictions du libre-échange

Les contradictions du libre-échange

La mobilisation des agriculteurs a remis sur le devant de la scène le traité de libre-échange (en cours de négociation) du Mercosur qui vise à baisser les droits de douane entre l’Union européenne et l’Argentine, la Bolivie, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay.

En 2015, l’opposition au TTIP (traité de libre-échange avec les États-Unis), mais aussi surtout au CETA (traité de libre-échange avec le Canada) avait fait les gros titres. Surtout quand Paul Magnette avait fait mine de s’y opposer en tant que ministre-président wallon, avant de le signer.

Mais les travailleurs n’ont rien à espérer de l’adoption ou du rejet de ce traité.  Car ces traités n’ont pour but que de régler temporairement un certain nombre de problèmes de concurrence entre capitalistes, pas d’améliorer le sort des travailleurs ni des petits agriculteurs.

Et comme tous les traités de libre-échange, l’adoption ou le rejet du Mercosur dépendra des exigences des capitalistes les plus puissants.

Le capitalisme a accéléré la mondialisation

Avant même les débuts du capitalisme, les échanges étaient mondialisés. Le capitalisme a simplement développé la mondialisation.

Dès le 13e siècle, puis la découverte du continent américain à la fin du 15e et l’ouverture des routes commerciales de l’Atlantique, les marchands ne se sont pas limités aux frontières de ce qui allait devenir l’Europe.

Par les routes de la soie vers la Chine, puis par la colonisation de l’Amérique à la fin du 15e siècle, et celle des pays d’Asie et d’Afrique au 19e, les bourgeois européens ont installé des comptoirs aux quatre coins du monde pour faire du commerce et piller les ressources et les peuples de chacun de ces continents.

Ces richesses accumulées permirent le décollage de la révolution industrielle à la fin du 18e siècle. Pour écouler la nouvelle production industrielle à grande échelle, la bourgeoisie ouvrit des marchés en construisant des voies de chemin de fer, développa la navigation et le commerce de longue distance.

Au début des années 1900, le commerce mondial avait explosé aussi bien pour la production agricole que la production manufacturée.

Cette mondialisation du commerce, si elle permit de connecter l’humanité et de développer le commerce et la production, se fit dans le sang et la sueur. Le capitalisme en s’étendant sur toute la planète détruisait toutes les autres civilisations et empires qui préexistaient. Partout où les capitalistes s’implantaient, ils semaient l’exploitation, les épidémies, les famines et les guerres.

Le capitalisme développe la classe ouvrière

Les militants communistes Marx et Engels, tout en dénonçant la barbarie du capitalisme, ont montré que derrière les atrocités, les crises et les guerres, existait la possibilité d’utiliser la production industrielle à l’échelle mondiale créée par le capitalisme pour répondre aux besoins de toute l’humanité.

Et ce n’était pas un doux rêve, car la classe sociale qui pouvait organiser la production à l’échelle mondiale était en train de naître : la classe ouvrière.

Car le développement du capitalisme, à l’époque comme aujourd’hui, transforme partout des millions de petits paysans et d’artisans en prolétaires qui ont partout les mêmes intérêts, les mêmes ennemis et qui sont reliés par l’organisation mondiale de la production.

Libre-échange ou protectionnisme ?

Depuis la fin du 19e siècle, la production et le commerce sont contrôlés par une poignée de grandes multinationales – comme General Electrics, Exxon Mobile, Unilever, Volkswagen, Microsoft, etc. – qui ont souvent un poids supérieur à bien des États. Par le poids économique de ces multinationales, leurs actionnaires imposent de fait leur politique aux États du monde entier.

Mais pour défendre leurs intérêts, ces multinationales se reposent essentiellement sur leur État national et sur leurs politiciens, que ce soit pour obtenir des contrats et des aides publiques, pour obtenir une législation favorable, protéger leurs investissements à travers le monde y compris par l’intervention militaire.

Par exemple, le groupe Volkswagen attend de l’État allemand qu’il protège ses investissements, qu’il facilite son implantation à l’étranger, qu’il défende ses intérêts contre ses concurrents européens, qu’il lui donne des subventions publiques pour garantir ses profits, etc.

L’armée française est intervenue au Mali, contre l’avancée de rebelles islamistes, pour protéger le Niger et ses mines d’uranium nécessaires au groupe Français Orano.

Les traités de libre-échange sont négociés entre États

Les multinationales sont en concurrence à l’échelle mondiale pour se répartir les marchés. Chacune voudrait protéger son marché et capter celui de son concurrent.

Mais ces échanges et la concurrence ne sont pas « libres » ni faits sur un pied d’égalité.

Quand l’Union européenne négocie un traité de libre-échange avec l’Ukraine ou le Vietnam par exemple, elle est en mesure de dicter sa volonté à ces États, car elle est bien plus riche et puissante.

Dans d’autres cas, les États peuvent devenir protectionnistes pour permettre à des entreprises locales de maintenir leurs prix plus élevés, malgré la concurrence des entreprises étrangères.

Ainsi, si les gouvernements wallons ou français s’opposent aujourd’hui, en parole au moins, au traité du Mercosur c’est parce que les trusts agroalimentaires locaux ne veulent pas subir la concurrence des exploitations sud-américaines.

Mais ce n’est certainement pas parce que les normes sanitaires seraient « meilleures » en Europe. Les nombreux scandales sanitaires de ces dernières années – la présence de PFAS dans l’eau, le scandale de la vache folle, le lait contaminé de Lactalis (qui avait contaminé des dizaines de nourrissons), les lasagnes à viande de cheval de Findus, etc. – montrent que les capitalistes européens de l’agroalimentaire se soucient bien peu de la santé de ceux qui consomment leurs produits.

Libre-échange et protectionnisme : deux politiques aux service des capitalistes 

Dans leur concurrence mondiale, les États peuvent passer de l’un à l’autre, ou défendre l’un dans un secteur et l’autre dans un autre secteur, en fonction des intérêts des entreprises.

Les travailleurs n’ont aucun intérêt à soutenir l’une ou l’autre de ces politiques, car aucune n’empêche les capitalistes de licencier et d’imposer de bas salaires pour faire plus de profits.

La violence économique contre les travailleurs ne vient pas des traités de libre-échange, mais de la course au profit des capitalistes et de leur concurrence qui entraînent crises et guerres.

Pour mettre fin à l’exploitation et aux guerres, il faudra renverser le système capitaliste et pour cela, les travailleurs du monde entier sont nos meilleurs alliés.