« Peu importe le choix dans l’isoloir, il faut s’attendre au retour du corset budgétaire » annonçait le journal « Le Soir ».
Difficile de faire plus clair. En dépit du résultat des élections de juin 2024, les partis du prochain gouvernement chercheront à imposer de lourdes mesures d’austérités à la population pour respecter les intérêts de la bourgeoisie.
Car derrière les raisonnement des « experts économiques », derrière les « règles budgétaires européennes », derrière l’abstraction des chiffres de la dette, du PIB et de la croissance, se tient la classe des propriétaires et actionnaires des grandes banques, des grandes entreprises et des multinationales. Et, face à la crise et aux contradictions du capitalisme, la bourgeoisie est amenée à lever le voile sur l’illusion de la démocratie, et à laisser discuter dans la presse, au vu et su de tous, du prochain « casse » qu’elle prévoit aux dépens de la population.
L’état des finances publiques est un problème insoluble pour le patronat. Pour maintenir l’augmentation de leurs profits dans la concurrence acharnée par la crise, les capitalistes réclament de leurs gouvernements toujours plus d’allègements d’impôts, de subsides, d’emplois défiscalisés, de soutiens à l’investissement… Pour soutenir les guerres actuelles et préparer les suivantes, qui résultent inévitablement de la guerre économique que se livrent les multinationales, la bourgeoisie réclame l’achat de matériel militaire, l’embauche de soldats, et entre autres choses, le financement des « services citoyens ».
Tout cela coûte cher, et aggrave le déficit de l’Etat, déficit comblé par des emprunts aux grandes banques et institutions financières. Les intérêts des emprunts versés par l’Etat aux banques viennent à leur tour grossir la fortune de la bourgeoisie ! Ainsi la boucle est bouclée : plus de subventions, plus de dépenses d’Etat, plus d’emprunts, plus d’intérêts des emprunts… la bourgeoisie s’enrichit à chaque étape !
Chaque nouveau sursaut de la crise est l’occasion pour chaque capitaliste de spéculer sur le prix des marchandises. Mais l’inflation entraînée par la spéculation rogne la valeur du capital détenu par les banques, alors, en réaction, les banques centrales relèvent leurs taux d’intérêts pour tenter de protéger les profits financiers.
Le remède d’un jour se transforme alors en poison le lendemain. Car l’Etat est surendetté, et ses finances plient sous la charge de la dette et des intérêts augmentés, alors que, la crise s’approfondissant encore, le patronat attend des gouvernements de nouvelles dépenses, … et le remboursement de l’argent prêté.
C’est donc l’alarme dans les rangs capitalistes. Le FMI, la commission européenne, la FEB (le syndicat patronal), le bureau du plan, tous les comptables de la bourgeoisie, en appellent urgemment à « l’assainissement des finances publiques », à l’austérité. Il faut trouver 27 milliards, proclame la ministre du budget Alexia Bertrand (Open VLD) ! Moins 3,9 milliards de dépenses par an pendant 7 ans, renchérit le ministre des Finances Vincent Van Peteghem (CD&V) ! Derrière eux, c’est toute la bourgeoisie qui crie : qu’on fasse payer les travailleurs ! Qu’on coupe dans les dépenses utiles à la population, dans le financement des hôpitaux, des écoles, des CPAS, de la culture, dans la sécurité sociale, dans le budget des pensions, dans l’indexation ! Que la population paye, y compris les pauvres !
Les politiciens en campagne électorale l’entendent bien. Ils savent que c’est le programme qu’ils devront appliquer une fois au gouvernement. Mais encore doivent-ils se faire élire… à coup de promesses mensongères et d’hypocrisie. Les socialistes en particulier, et avec eux leurs relais dans les directions syndicales, savent qu’ils jouent gros. Certains d’entre eux voudraient trouver un moyen de se dédouaner des futures saignées d’austérités qu’ils devront essayer de faire accepter. Par exemple en prévoyant d’accuser la droite, “les Flamands”, la NVA, et la future crise communautaire, de la responsabilité des mesures d’austérité, sans jamais accuser le capitalisme. Mais aussi en se préparant à accuser le PTB, si « il ne prend pas ses responsabilités » pour former « un gouvernement de gauche » et ainsi en finir avec sa concurrence, en l’associant à la déroute inévitable du PS suite aux mesures d’austérité.
Qu’il soit de gauche ou de droite, le prochain gouvernement ne pourra être qu’un gouvernement qui défendra les intérêts de la bourgeoisie. Et quelques élus PTB en plus ou en moins dans les Parlements ne changeront rien à l’affaire, car ce ne sont pas les Parlements qui dirigent, ni les ministres, mais la bourgeoisie dans les conseils d’administration des banques et des entreprises.
La seule force capable de s’opposer à la bourgeoisie, c’est la classe ouvrière, mobilisée, et déterminée à lutter pour défendre ses intérêts. Seul l’effroi devant une explosion sociale pourrait à ce stade faire reculer le patronat, qui aujourd’hui se sent en pleine possession du rapport de force, après avoir pu imposer au mouvement ouvrier une baisse importante du pouvoir d’achat, la restructuration du secteur de la distribution, de nombreux licenciements, etc.
Le système capitaliste s’enfonce dans la crise et toujours plus vers la barbarie de la misère et des guerres. La bourgeoisie n’a aucune issue à sa disposition. Si la classe ouvrière ne trouve pas les moyens et l’énergie de s’opposer aux futures mesures d’austérités, celles-ci deviendront elles-mêmes la source de nouvelles contradictions, notamment en réduisant la consommation ce qui aggravera le chômage.
Mais, même à la tête d’un système moribond, en l’absence de larges révoltes des travailleurs, la classe capitaliste peut continuer à faire payer à la population le prix de son maintien à la tête de la société.
Aujourd’hui, c’est au prix de l’aggravation de l’exploitation, et de l’augmentation du nombre de milliardaires et de leurs profits, malgré la crise. Demain au prix de l’austérité, et après-demain, si rien ne change, ce sera au prix du sang et de la guerre. Il sera alors encore temps de se souvenir des paroles de L’Internationale “S’ils s’obstinent, ces cannibales, à faire de nous des héros, ils sauront bientôt que nos balles, sont pour nos propres généraux”.