Jeudi 12 décembre, à 3 heures du matin, la direction d’Audi a mis fin unilatéralement aux semblants de négociations avec les syndicats concernant les indemnités de licenciement des près de 3.000 travailleurs sous contrat Audi.
En réalité, la direction ne négociait pas, elle baladait la délégation. Et le montant annoncé, à peine augmenté, était sa première et dernière proposition ! Les directions syndicales ont heureusement refusé de signer pour ne pas perdre le crédit qu’il leur reste encore. Car en refusant de mobiliser dans un rapport de forces les travailleurs d’Audi et des entreprises sous-traitantes, en répétant depuis des mois : « Faites confiance aux délégués ! », les syndicats ont perdu la confiance de la plupart des travailleurs.
Comment faire confiance à des dirigeants syndicaux assez crédules pour croire que la direction d’Audi va céder parce qu’ils discutent « durement » autour de la table ?
Ou pire, comment suivre des dirigeants syndicaux, dont certains ont consciemment joué le jeu des fausses négociations parce qu’ils craignent autant que les patrons la force des travailleurs mobilisés ?
Finalement, les directions syndicales se sont mises dans la situation où la direction d’Audi peut les traiter par le mépris ! Les actionnaires d’Audi envisagent maintenant de soumettre leur « offre », qu’ils jugent « généreuse », individuellement aux travailleurs sans plus passer par les syndicats.
« La direction d’Audi ne respecte pas le dialogue social » se sont lamenté les dirigeants syndicaux. Mais les seuls qui ont pris au sérieux ce dialogue social, ce sont les directions syndicales ! Pour la direction d’Audi, comme pour tout le patronat, ce n’était que du cinéma, cinéma destiné à endormir les travailleurs !
La direction d’Audi, comme tout le grand patronat, mène la lutte des classes. Elle ne connaît que le rapport de forces. Et les directions syndicales ayant baladé suffisamment les travailleurs, Audi juge le moment favorable pour se passer du cinéma de la concertation sociale. A moins d’une mobilisation qui dépasse les limites des directions syndicales, bien plus de patrons prendront exemple sur Audi et tenteront de se passer des syndicats !
Audi ne fait aucun cadeau
Jeudi matin, les médias, qui sont du côté des actionnaires et du patronat, annonçaient des chiffres dictés par la direction d’Audi. On apprenait ainsi que jusqu’à 400.000 euros seraient proposés et, entre 125.000 et 190.000 euros pour un travailleur avec 17 ans d’ancienneté, 50.000 euros pour un travailleur avec une année d’ancienneté. La seule raison de cette communication de la direction, qui par ailleurs cultive l’opacité, c’était de donner des travailleurs d’Audi une image de « privilégiés » bien ingrats s’ils n’acceptent pas cette offre soi-disant « généreuse ».
Ces chiffres ne correspondent pas aux chiffres que les travailleurs ont reçu des syndicats. Et ils sont à diviser par deux, car il s’agit de montants bruts.
De plus, ils comprennent le préavis légal – et ce n’est qu’à la fin qu’on peut avoir droit aux allocations de chômage. Alors que représentent 60.000 euros net, quand la moitié doit couvrir les dépenses du ménage pendant les mois sans chômage ?! Qu’est-ce que ça représente après avoir perdu sa santé à l’usine ?! Qu’est-ce que ça représente quand on sait qu’il sera difficile de trouver un nouveau travail ?!
L’enveloppe d’environ 400 millions d’euros pour les indemnités légales et extra-légales, ne représente même pas 2,2% du bénéfice net du groupe Volkswagen en 2023 ! Ce qui restera aux travailleurs après les impôts ne représente même pas 1,1% !
Il faut préparer la lutte
Les licenciements chez Audi ne sont pas une exception. De nombreuses entreprises ferment ou licencient partiellement ou s’apprêtent à le faire. Face à cette vague de licenciements qui arrive, il faut se préparer à une lutte collective ! Et la direction d’Audi nous montre clairement qu’en ne comptant que sur la « concertation sociale », en ne comptant que sur des représentants syndicaux qui parlent au nom des travailleurs dans des réunions dont les travailleurs sont exclus, on sera toujours perdants.
Ce que craignent les patrons, c’est que les travailleurs de différentes catégories, voire de différents secteurs, commencent à s’organiser et s’unissent autour de leurs intérêts communs pour faire payer les capitalistes qui s’enrichissent sur leur travail.
C’est la crise, les ventes baissent ? Ce n’est pas aux travailleurs de payer, ni dans le privé, ni dans le public, ni dans les usines, ni dans les bureaux ! Qu’on répartisse le travail entre tous, sans perte de salaire, en prenant sur les immenses profits accumulés !
Les travailleurs en lutte ont la possibilité de s’organiser, avec ou sans les délégués syndicaux, dans des comités démocratiques pour diriger leur action et créer un rapport de forces.
Les sous-traitants abandonnés par Audi
La situation est encore pire pour les travailleurs des entreprises de sous-traitance car leurs directions prétextent qu’Audi est le donneur d’ordres pour ne pas encore avoir engagé de négociations ! Et pour obtenir quoi ?
C’est le rôle des entreprises de sous-traitance de payer des salaires plus faibles, de rendre les fermetures moins chères pour les patrons, en comptant sur la division des travailleurs.
Ce qui fait que les travailleurs et les militants syndicaux sont dans une situation encore plus difficile s’ils n’arrivent pas à passer sur les divisions, y compris syndicales, pour une lutte commune de l’ensemble des travailleurs.
Les travailleurs des entreprises sous-traitantes n’ont plus beaucoup d’espoir de pouvoir imposer « le même plan social que chez Audi », mais depuis le début, ils ont montré le chemin qu’il faudra prendre en étant plus nombreux !