« Crapule », « menteur », « cow-boy », « margoulin », « voyou »… les dirigeants politiques se sont livrés à une véritable surenchère d’invectives contre Lakshmi Mittal, suite à l’annonce par ce dernier de la fermeture de 7 des 12 lignes du froid à Liège. Un langage viril avant un combat ? Non, juste des mots destinés à tenter de faire oublier leur servilité devant Mittal et le monde patronal en général.
Pas plus tard qu’en 2006, le même gouvernement wallon présentait Mittal comme le sauveur de la sidérurgie wallonne. Au nom de l’emploi, les actionnaires d’ArcelorMittal ont eu droit à toutes les largesses des gouvernements wallon et belge. Ils ont entre autres pu profiter de toute une série de réductions de cotisations sociales qui vident les caisses de la sécurité sociale. Et ArcelorMittal Finance Belgium pouvait en toute légalité rapatrier en Belgique les bénéfices de ses entreprises européennes où ils ne sont taxés qu’à 1,4%, grâce notamment aux fameux intérêts notionnels.
Mais cette politique, menée depuis des décennies par tous les gouvernements successifs et qui consiste à distribuer toujours plus d’argent aux capitalistes, n’a jamais sauvé des emplois, elle a par contre bien protégé leurs profits.
Les politiciens font mine de le découvrir. Mais c’est faux, ils mènent cette politique en connaissance de cause, car ils sont profondément liés et dévoués au monde capitaliste. Et ils ne changent aucunement le tir.
La seule réponse concrète de Di Rupo a été de répéter son leitmotiv qu’il faut « attirer les investisseurs par tous les moyens ». C’est dire qu’il est prêt à d’autres cadeaux aux patrons. Pourtant ces capitaux ne s’investissent pas, ils ne créent pas d’emploi, ils viennent juste chercher les avantages du paradis fiscal belge.
Et quand le ministre wallon de l’économie Marcourt dit que le gouvernement wallon va explorer toutes les pistes légales, c’est le mot « légales » qui faut entendre.
Légalement, un capitaliste a en effet le droit de fermer une usine et de la laisser rouiller, quitte à ruiner une région entière. Légalement, il a le droit en Belgique de ne payer quasiment pas d’impôts. Légalement, il a le droit de faire avec les bénéfices ce qu’il veut, y compris spéculer et provoquer des crises financières mondiales plutôt que de maintenir les installations.
Parce que la loi est celle des capitalistes ! Au nom de leur propriété sur les entreprises, ils ont en effet quasiment tous les droits… que les gouvernements respectent scrupuleusement et font respecter par la police.
Alors, le ministre peut toujours traiter Lakshmi Mittal de tous les noms, il fait clairement savoir qu’il refuse de toucher à ses prérogatives. D’autant plus que les ministres et députés PS ont voté ces lois uniquement favorables aux capitalistes et souvent les ont même conçues.
Le gouvernement va payer une société privée pour chercher un repreneur… Que peux-t-il en sortir ? Un nouveau capitaliste que les ministres pourront traiter de voyou demain quand il aura vidé les caisses publiques et exploité la partie des travailleurs qui ne sera pas licenciée, le temps que cela lui rapporte. L’outil sera peut-être maintenu un temps (si le gouvernement finance les investissements nécessaires), mais pas tous les emplois, ni les salaires, ni les conditions de travail.
Quant aux dirigeants syndicaux, ils réclament la nationalisation de la sidérurgie. Mais seule une nationalisation sans indemnité ni rachat, et sous le contrôle des travailleurs, changerait quelque chose à leur sort. La Région wallonne a déjà maintes fois été propriétaire ou copropriétaire d’entreprises sidérurgiques. Cela n’a pas empêché la disparition de dizaines de milliers d’emplois dans la sidérurgie.
Les travailleurs ne peuvent compter ni sur les ministres, ni sur les dirigeants syndicaux pour faire reculer les capitalistes. Mais les travailleurs menacés de licenciement dans la sidérurgie liégeoise ne sont pas seuls.
Ensemble avec leurs camarades de chez Ford Genk et ses sous-traitants, avec ceux de Duferco-NMLK, de Carsid, des travailleurs de Florange en France et d’autres sites d’ArcelorMittal en Europe, et avec tous les autres, ils peuvent être une force.
Une force capable d’imposer l’interdiction des licenciements sous peine de réquisition, la répartition du travail entre tous, en prenant sur les profits pour maintenir tous les salaires. Une force capable de changer les lois pour ôter aux capitalistes leur pouvoir de jeter les travailleurs dans la misère !