Il y a 60 ans, le 17 janvier 1961, Patrice Lumumba, le premier premier ministre du Congo indépendant était assassiné sur l’ordre des autorités de la Belgique et de la CIA. Le Congo venait d’accéder à l’indépendance après 75 ans de colonisation par la Belgique.
Entre 1885 et 1908, le Congo avait appartenu personnellement à Léopold II qui y fit instaurer un régime de travail forcé et de déplacement de populations afin d’exploiter les richesses en caoutchouc et en ivoire. Les exactions commises par les milices de Léopold II, comme le fait de faire couper une main aux travail-leurs ne rapportant pas assez de caoutchouc étaient telles qu’elles menèrent à des campagnes de dénonciation internationales et poussèrent le roi à céder le Congo à l’État belge en 1908.
Le sort des Congolais ne s’améliora pas sous la domination belge. La peine de la chicotte par exemple (un fouet en peau de rhinocéros), réservée aux Noirs, fut appliquée jusqu’en 1958. L’État belge pratiquait aussi une politique de ségrégation au Congo, les quartiers des villes réservés aux Noirs étaient séparés de ceux des Blancs, et les Noirs devaient être munis d’un laisser-passer. De plus, l’enseignement supérieur était quasiment réservé aux seuls Blancs. Quand la Belgique quitta le Congo en 1960, il n’y avait que 17 diplômés noirs !
Quand le mouvement d’indépendance gagna le continent africain, la Belgique n’avait pas du tout préparé l’indépendance. En 1956, un plan l’envisageait pour 30 ans plus tard ! Mais suite au soulèvement de tout le continent, et face à des émeutes au Congo, l’État belge accorda l’indépendance dans la précipitation.
Des élections donnèrent Kasavubu président et Lumumba premier ministre. Lumumba était un des rares congolais à avoir pu un peu étudier, il était employé de poste et avait pu accéder au statut d’«évolué» (les Congolais qui savaient lire et écrire devaient subir une inspection de leur mode de vie. Se servir d’un appareil électroménager, utiliser un couteau et une fourchette étaient des critères de civilisation pour l’administration belge).
Au lendemain de la conférence panafricaine d’Accra, au Ghana qui venait d’accéder à l’indépendance, Lumumba constitua le Mouvement National Congolais, ou MNC, se donnant pour but de « mettre tout en œuvre pour libérer le Congo de l’emprise du colonialisme impérialiste ». Il s’agissait d’un mouvement politique qui n’était pas à base ethnique et qui se voulait à l’échelle de cet immense pays.
Le discours prononcé par Lumumba lors de la cérémonie d’indépendance le 30 juin 1960 qui dénonçait l’oppression coloniale et appelait les Congolais à montrer au monde « ce que l’homme noir peut faire quand il travaille dans la liberté » valu à Lumumba la popularité et le soutien des masses congolaises.
Pour s’assurer le maintien de ses intérêts capitalistes au Congo, la Belgique fit tout pour enrayer et contrôler le processus indépendantiste. Cela alla jusqu’à fomenter la sécession de la province du Katanga, riche en minerais et fief de l’Union minière, peu de temps après c’est la riche région de Kasaï qui faisait sécession.
Finalement les USA et la Belgique arrêtèrent Lumumba et le livrèrent à ses ennemis katangais qui l’exécutèrent. Mobutu sera porté au pouvoir qu’il exercera de manière dictatoriale durant 30 ans, au service des USA et de la Belgique.
En 2002, suite à une commission d’enquête organisée sur l’assassinat de Lumumba, après la parution du livre de Ludo de Witte, le ministre belge des Affaires étrangères Louis Michel a présenté, ses » excuses » et ses » profonds et sincères regrets » au peuple congolais pour le rôle de la Belgique dans l’assassinat de Patrice Lumumba. Ces » excuses » ne manquaient pas d’hypocrisie car la Belgique reconnaissait sa » responsabilité morale « , mais réfutait toute implication dans l’assassinat du leader indépendantiste congolais.
En 2000, dans un documentaire télévisé, un commissaire de police belge, Gérard Soete, témoignait avoir découpé et dissous dans l’acide le corps de l’ancien Premier ministre. Une enquête a été ou-verte en 2012 par le parquet fédéral belge, mais elle est toujours en cours !
Le refus de reconnaître la vérité historique et le sort réservé à Lumumba montrent que ce sont toujours les mêmes impérialistes qui dirigent et exploitent le monde aujourd’hui.