Qui s’en met plein les poches ?

Lors d’une récente émission, la RTBF a tenté de faire le point sur la composition des prix de vente des produits agricoles, pour constater que la plupart des agriculteurs ne s’enrichissent pas, que les grandes surfaces ne feraient qu’autour de 1% de profit net, et que par contre « il est difficile voire impossible de savoir précisément qui sont les intermédiaires et quelles sont leurs marges » ! [RTBF , La grande distribution ne fait que 1eur de bénéfice sur un caddie de 100eur]

Effectivement le secret des affaires et les secrets commerciaux sont inscrits dans la loi et protègent les profits capitalistes des regards indiscrets, du fisc et surtout de la population.

Et tout le monde peut constater que si de plus en plus de familles de travailleurs ont de plus en plus de difficulté à joindre les deux bouts – et dans les pays pauvres c’est pire –, les riches deviennent encore plus riches.

Oxfam a publié que « les 1% les plus riches ont capté près de deux fois plus de richesses que le reste de l’humanité » et que « la fortune des milliardaires augmente de 2,7 milliards de dollars par jour alors même que les salaires de 1,7 milliard de personnes ne suivent pas le rythme de l’inflation. »

Comment les riches
s’enrichissent ?

Supermarchés 

Les actionnaires ne feraient que 0,91€ de profit sur un caddy de 100€.

Mais sur des millions de caddys et des milliards d’euros que brassent les supermarchés, cela rapporte de confortables profits.

Et surtout ils font « travailler » l’argent qu’ils brassent : les clients payent le jour de l’achat, les centrales d’achat ne font que peu de stock, et ne payent les fournisseurs qu’à 30, 60 voire 90 jours.

Pendant ce temps les centres financiers des grandes surfaces disposent de milliards d’euros à placer dans la spéculation financière mondiale. Et cela rapporte gros aux actionnaires.

Fournisseurs des agriculteurs

Les agriculteurs d’aujourd’hui doivent disposer de matériel performant, ne serait-ce que pour labourer, ensemencer, récolter, seul ou à deux des dizaines d’hectares.

Ils ont besoin de grains pour les semences et d’aliments pour les poules, cochons et vaches ; et d’étables équipées d’électronique et de conteneurs réfrigérés pour la traite et la conservation du lait.

Tous ces moyens sont entre les mains de multinationales, certes en concurrence, mais dont les prix sont déterminés par les plus puissantes.

Intermédiaires de l’agro-alimentaire

Les intermédiaires entre les agriculteurs et les magasins, ce sont notamment les firmes de l’agro-alimentaire qui achètent aux agriculteurs et livrent aux centrales d’achat des grandes surfaces et aux petits magasins.

Ce sont entre autres les multinationales Nestlé, Kraft, Mondelez, Unilever… Leurs profits officiels sont effectivement très élevés et opaques.

Spéculation sur les aliments

C’est qu’en plus de la spéculation financière, toutes les multinationales spéculent aussi sur les matières premières, y compris les aliments, achetant quand les cours sont bas, revendant quand ils sont hauts, organisant au passage la rétention dans les entrepôts de blé, de riz, d’huile, pour faire monter les cours… et provoquant des famines.

Partage des profits entre riches

Mais il ne faudrait pas croire que tous ces secteurs en concurrence sont indépendants !

Les millionnaires et milliardaires ne placent pas tous leurs œufs en or dans le même panier !

Les milliards d’argent disponibles sur les comptes des grandes surfaces peuvent très bien servir à la spéculation sur les aliments ! Et les actionnaires de Nestlé ont probablement des parts dans les industries de tracteurs, voire dans « Teucrium Fonds » et « Invesco DB Agriculture Fonds », cités par la RTBF comme « deux des plus grands fonds mondiaux en matière première ».

Alors quelles solutions ?

Taxer les plus riches ? 

Il y a même des millionnaires et milliardaires qui le demandent !

Quand il y a eu l’impôt sur la fortune (ISF) en France, cela n’a amélioré ni la vie des travailleurs, ni celle des agriculteurs. Quelques milliardaires ont quitté le pays, comme les Mulliez (Auchan), et se sont « réfugiés » en Belgique, en quelque sorte un paradis fiscal par rapport à la France !

Mais même si les recettes de l’État se trouvaient augmentées de quelques millions, il faudrait encore qu’elles soient dépensées au profit de la population, et non en aide aux banquiers ou pour l’armement !

Revenir en arrière ? 

Comme le proposent des décroissants, qui parlent de retourner à une agriculture plus « naturelle », « comme avant »…

Mais il faudrait revenir à une population d’un milliard d’habitants, deux siècles en arrière !

Et alors que faire des autres 7 milliards d’humains actuels ?

Une agriculture rationnelle, moderne et à grande échelle ne veut pas nécessairement dire destruction de la planète. Par contre, une agriculture soumise au diktat du profit, oui !

Retour à une économie « locale » ? 

Le dada des nationalistes ! Ils disent vouloir une agriculture nationale protégée par des droits de douane élevés !

Au mieux cela rejoint le camp des décroissants, ne serait-ce parce qu’il faudrait se passer d’engrais, qui viennent tous d’importations de phosphates ou d’une chimie à partir du gaz naturel… qu’on ne trouve pas ici !

Des solutions au-delà du capitalisme 

Le capitalisme a apporté énormément de progrès à l’humanité, même si c’est dans la sueur et le sang : 8 milliards d’humains vivent aujourd’hui contre 1 milliard il y a deux siècles.

La science, la médecine, l’agriculture ont fait d’immenses progrès ; la communication entre les humains est devenue quasi instantanée ; la plus grande partie de l’humanité sait lire et écrire…

Ce dont souffre l’humanité, ce dont souffre l’agriculture actuelle, c’est avant tout de la concurrence et de la course au profit. Et cette concurrence et course au profit sont la cause des principales guerres qui ensanglantent la planète !

Il y a d’abord la concurrence entre agriculteurs et fournisseurs au détriment des agriculteurs ; ensuite la concurrence entre agriculteurs et centrales d’achats, au détriment encore des agriculteurs ; la concurrence entre industrie agro-alimentaire et centrales d’achats et enfin la concurrence entre agriculteurs eux-mêmes.

Les consommateurs, tout comme les petits agriculteurs, souffrent aussi de la spéculation sur les matières premières alimentaires, de la course au profit d’une poignée de financiers qui augmentent leurs profits en faisant augmenter les prix des aliments, tout en réduisant les prix payés aux agriculteurs.

Tout dans le capitalisme est prévu pour que les plus riches s’enrichissent encore plus au détriment de la majorité de la population, consommateurs, ouvriers et employés, agriculteurs et artisans. Et de nombreuses lois sont là pour cacher la façon dont ces riches s’enrichissent.

Les travailleurs des entreprises, nationales et multinationales pourraient mettre en commun et publier les chiffres des entrées et des sorties des plus grandes entreprises pour réaliser la vérité des prix et des profits, ce que ne veulent surtout pas faire chaque État national.

Et puis c’est en faisant sauter la concurrence et la course au profit, que l’humanité aurait tout à fait les moyens de se nourrir correctement, se loger, avoir accès à l’eau et à la culture sur tous les continents, dans tous les pays.

L’ensemble de la population mondiale aurait alors à sa disposition une industrie et une distribution alimentaire en partie planifiée au niveau mondial, dont il suffirait de réorienter les objectifs vers la satisfaction des besoins humains plutôt que vers le profit.

Supprimer la concurrence et la course au profit, cela impose de supprimer la propriété privée des capitaux et des grandes industries, c’est-à-dire supprimer le capitalisme.

L’abolition du capitalisme mettrait aussi fin aux guerres qui ravagent la planète.

Cela veut dire renverser la bourgeoisie et le capitalisme pour une société communiste !

Utopique ? Pas plus que lorsque la bourgeoisie révolutionnaire a renversé les rois et les nobles il y a deux siècles !