Le 12 juin, l’entreprise de produits d’hygiène Ontex a annoncé la suppression de 349 emplois sur son site de production à Eeklo et 140 sur celui de Buggenhout (Flandre orientale). Et ces chiffres ne tiennent pas compte des intérimaires. Derrière ces deux sites industriels, il y a en plus des sous-traitants, comme l’entreprise d’emballage Mirto dont Ontex est le principal client. Et enfin il faut compter les ouvriers des entreprises de logistique qui seront impactés.
Pour justifier les suppressions d’emplois, l’entreprise assène brutalement la logique capitaliste : le marché est hautement concurrentiel, il faut rationaliser les coûts (entendez, optimiser les profits). La direction ne se gêne pas non plus de reprendre la vieille rengaine des « coûts salariaux trop élevés en Belgique ». Sans vergogne, quand on sait que le PDG a reçu un bonus annuel de 5 millions d’euros en décembre 2023.
Ontex est en effet tout sauf une petite entreprise. C’est une multinationale qui est devenue, depuis une série de rachats dans les années 80, le plus gros producteur européen de couches pour bébés et de bandes hygiéniques. Ontex est cotée en bourse depuis 1998 et a été rachetée en 2002 par le fonds d’investissement britannique Candover pour 1,1 milliard. Elle compte 10.000 salariés sur plusieurs continents.
L’année passée, le groupe a fait 34 millions de bénéfices et se félicite de « l’excellente reprise des profits ». Clairement, c’est pour garantir que cette reprise se maintienne que la direction restructure l’entreprise. En décembre passé, 26 salariés de l’équipe du week-end avaient déjà été mis à la porte. Ballon d’essai pour évaluer les réactions des travailleurs et des délégations syndicales ?
Le 20 juin dernier, le ministre flamand de l’emploi Brouns (CD&V) a reçu la délégation syndicale et s’est engagée « à accompagner au mieux les travailleurs licenciés dans la recherche d’un nouveau job ». Dans le contexte de pluie de fermetures et de pertes d’emplois, ce genre de déclaration relève franchement du cynisme.
Ontex : petite histoire d’un grand bourgeois
« Fondée par un fils de paysan dans son garage, l’entreprise Ontex connait sa fin de gloire. » Avec ces grands titres, c’est tout un scénario de conte de fées que les médias bourgeois écrivent pour justifier le bain de sang social que représentent les suppressions d’emploi chez Ontex.
Le fils de fermier, Paul van Malderen, était en réalité ingénieur et il avait dirigé deux entreprises avant de fonder Ontex en Flandre orientale, en 1980. Dans son garage ou à son bureau, peu importe, Paul van Malderen était un chef d’entreprise avant tout. C’était un bourgeois qui savait comment conduire ses affaires et exploiter des travailleurs et il a, pour ce faire, mené de concert une carrière politique au sein du CVP (ancien CD&V).
Il a envoyé ses deux enfants étudier dans des écoles privées en Suisse et aux USA. Son fils a repris Ontex fin des années 90. Sa fille a dirigé un bureau à Paris, puis s’est consacrée aux vignes que son père possédait dans la région de Bordeaux.
Quand le fonds d’investissement britannique Candover a racheté Ontex en 2002, il n’y a qu’un fils qui est resté à son poste dirigeant, les autres membres de la famille, raconte De Standaard, « ont pris l’argent et sont partis vivre de leurs rentes ».
Exactement comme dans le cas de Van Hool, ces rejetons de bourgeois vivent de rentes tirées de décennies de travail sué par les centaines de familles de travailleurs qu’Ontex a mis à la porte tout au long de ses diverses « restructurations ». Mais ce sont eux qui dirigent l’économie, à leur seul profit.
La classe capitaliste, qu’elle soit « bien flamande », « bien belge » ou de n’importe quel autre pays, a les mêmes mécanismes d’existence : exploiter pour faire du profit, licencier pour l’optimiser, et vivre en parasite de toute la classe travailleuse sans aucune limite.
Qu’ils soient flamands, belges ou étrangers, les travailleurs ont tous le même intérêt : s’organiser ensemble pour arracher le pouvoir aux capitalistes avant que ceux-ci ne les mènent totalement à la ruine.