Au moins 129 personnes ont été massacrées par l’armée congolaise pendant la nuit du 1er au 2 septembre dans la prison de Makala dans la capitale du Congo, Kinshasa, lors d’une fusillade. Celle-ci se serait déroulée suite à une tentative d’évasion à l’occasion d’une coupure de courant.
Ce type de massacre est courant de la part de l’armée congolaise. Il y a un an, c’était les membres d’une secte religieuse qui s’apprêtaient à manifester contre l’ONU qui étaient mitraillés par l’armée, une cinquantaine d’entre eux étant tués.
Cette armée n’a pas d’autre vocation que de jouer les garde-chiourmes pour l’impérialisme, et de faciliter le pillage du pays par les entreprises occidentales, dans un pays où 3 personnes sur 4 vivent avec moins de 2€ par jour, malgré ses immenses richesses.
Des prisons… coloniales
Le massacre dans la principale prison de Kinshasa a été l’occasion de rappeler l’enfer que vivent les détenus dans cette ville de 17 millions d’habitants. Il s’agit d’une des deux prisons pour la ville, et les conditions y sont atroces. Construite en 1957 par les colons belges, elle était faite pour 1.500 détenus , et n’a jamais été rénovée depuis. Ce sont actuellement près de 15.000 personnes qui s’y entassent ! Mis à part les quelques détenus les plus riches, la plupart des prisonniers ne sortent jamais de leurs cellules, où ils ont à peine la place pour rester debout. Le journaliste Stanis Bujareka Tshiamala, qui y a été enfermé, a filmé les cellules où les individus sont obligés de dormir les uns sur les autres, à même le sol, dans des salles sans électricité.
Les gardiens ne se risquent pas à entrer dans la prison, et nomment certains détenus pour assurer l’ordre, en punissant les détenus et en leur extorquant de l’argent au passage. Les violences y sont nombreuses, en particulier envers les femmes.
Les conditions sanitaires y sont catastrophiques, avec environ 4 WC pour 2.000 personnes. La nourriture y est rarement distribuée, et beaucoup de détenus finissent par mourir de famine, de maladies, d’étouffement ou de violences. Ce serait plus de 500 personnes qui y seraient mortes rien qu’en 2023 selon un rapport de la Fondation Bill Clinton.
Les prisonniers sont pourtant majoritairement enfermés sans aucun jugement, la majorité étant en détention « provisoire », parfois depuis des années. Des journalistes ou opposants se retrouvent dans cette prison ou dans un des nombreux cachots clandestins de la ville, quand ils ne sont pas assassinés immédiatement.
Les femmes comme boucs-émissaire
Encore plus que les hommes, les femmes enfermées dans la prison de Kinshasa subissent des violences quotidiennes. Comme le précise un témoin dans le journal le Soir : « A Makala, tout le monde viole, les prisonniers attaquent des femmes qu’ils disent être des prostituées, les policiers, les gardiens font la même chose et les militaires ne se privent pas non plus ».
Cette violence n’a rien de nouveau et était déjà organisée par les colons belges. L’écrivain congolais Paul Lomami Tchibamba, auteur du roman Ah ! Mbongo a décrit à quoi ressemblait l’entrée dans une prison de Kinshasa (à l’époque Léopoldville) : l’administration coloniale imposait aux prisonniers de gifler une détenue et de l’insulter, en expliquant que c’étaient les femmes qui étaient à l’origine de leur emprisonnement, car c’était soi-disant elles qui appauvrissaient les hommes par leurs caprices. Une manière de tenter de détourner la colère des détenus vers les femmes congolaises plutôt que vers leurs véritables affameurs, les capitalistes occidentaux. La fin de la colonisation n’empêche pas de perpétuer ces oppressions barbares.