« Nous sommes des ouvriers, nous défendons notre emploi ici ! »

Mardi 12 novembre, la direction d’Audi annonçait qu’aucun repreneur « crédible » pour le site d’Audi à Bruxelles n’a pu être retenu. Les travailleurs, eux, n’ont même pas eu connaissance des noms et projets de ces « candidats repreneurs » fantomatiques. Le lendemain, mercredi, une réunion entre la délégation syndicale et la direction avait lieu pour discuter des indemnités pour les travailleurs licenciés.

Les premières propositions de la direction qui circulent (2.500 euros par année d’ancienneté avec un socle de 12.000 euros brut) sont ridiculement basses pour tenir jusqu’à retrouver un emploi correct ou la pension, surtout pour une entreprise qui a fait des milliards de bénéfices (6 milliards pour Audi, 18 milliards pour tout le groupe VW).

La proposition des syndicats d’un socle de 60.000 euros brut a été balayée d’un revers de main méprisant par la direction qui qualifiait cela d’utopique et a menacé d’arrêter les négociations. Cela représente pourtant à peine plus d’un an de salaire ! Or, un nouveau travail –correctement payé– ne se trouve pas en « traversant la rue » ! Et, comme le font remarquer beaucoup de travailleurs : Audi s’était engagée à une garantie d’emploi jusqu’à fin 2027. C’est avec cette garantie qu’une partie des travailleurs ont planifié leurs dépenses. L’entreprise doit au moins honorer ces engagements et payer les salaires pour cette période !

Mercredi 13 novembre, une bonne centaine de travailleurs se sont donc rassemblés dès 9 heures du matin, pour soutenir les délégués en négociation pour le plan “social”. Pour ne pas se faire oublier, ils faisaient du bruit dans la cour, à l’aide de mégaphones et de pétards. En fin d’après-midi, voyant que les négociations n’aboutissaient pas, plusieurs dizaines de travailleurs sont montés et se sont postés devant la salle de réunion. Dans la rue devant l’usine, les feux ont été rallumés. Des pétards inoffensifs résonnaient à l’entrée de l’usine.

La direction a alors appelé la police… dont il s’est avéré qu’elle était déjà stationnée dans l’usine ! Les négociateurs de la direction, visiblement mal assurés devant les travailleurs qu’ils envoient au chômage, étaient désormais escortés par des policiers pour aller aux toilettes. Les travailleurs restaient pourtant calmes, jusqu’à ce que la police, avec matraques et boucliers, ait commencé à charger les travailleurs pour les pousser en dehors du bâtiment. Plusieurs travailleurs ont reçu des coups sur les épaules ou sur la tête. « Voilà comment on nous traite », commentait un ouvrier.

Devant l’usine, la colère s’est aussi exprimée envers les médias, dont certains avaient écrit que les travailleurs « séquestraient » la direction, peignant les ouvriers comme des violents,… alors que la violence vient de la direction d’Audi qui envoie des milliers de travailleurs et leurs familles dans la misère, tout en distribuant des milliards de dividendes à ses actionnaires ! Après l’angoisse devant des cadences intenables, c’est depuis des mois l’angoisse du lendemain. « Nous sommes des ouvriers ici, nous défendons notre emploi. Nous ne sommes pas un passe-temps pour les médias ! ».

« Vive la démocratie, vive le roi, vive la reine ! » tonnaient certains cris ironiques et amers. En effet, le cirque électoral étant à peine passé, la dictature du capital se montre en uniforme de robocop. Il serait pourtant normal que les travailleurs puissent assister aux réunions qui concernent directement leurs existences, c’est normal et responsable qu’ils se préoccupent de la subsistance de leurs familles !

Bien sûr, pour affronter le patronat et son État, il faudra un rapport de force plus conséquent, il faut devenir plus nombreux. Et il faudra se donner les moyens et l’organisation pour que le camp des travailleurs aussi puisse avoir une stratégie face à la guerre de classe déclenchée par le patronat, lui permettant d’imposer son agenda et ses intérêts, intérêts qui sont ceux de toute la société !