Les travailleurs de Rhenus refusent l’arnaque

Le directeur du sous-traitant d’Audi, Rhenus Logistics, a eu une mauvaise surprise jeudi 20 mars. Il avait convoqué les 120 travailleurs environ de l’entreprise pour participer à un référendum sur ce qu’il appelle le « plan social », mais les travailleurs de l’entreprise ont refusé d’aller voter.

Avec l’arrêt de la production chez Audi le 28 février, les firmes sous-traitantes ont également cessé leur activité sur le site. Après un simulacre de négociations, la prime extra-légale qui leur est proposée s’élève à 1.500 € brut par année d’ancienneté. Si les travailleurs d’Audi ont eu des cacahuètes, pour les travailleurs sous-traitants, les patrons proposent des miettes de cacahuètes.

Or, les permanents et les délégués FGTB étaient prêts à signer cette dernière proposition patronale. Les délégués qui avaient organisé la mobilisation ces derniers mois, avaient participé aux négociations pour tenter d’obtenir le maximum et non pour expliquer aux travailleurs qu’il fallait se contenter des miettes patronales. Leur confian­ce dans les permanents (surtout de la FGTB) est complètement rompue.

Pour empêcher la signature par les permanents du si mal nommé « plan social », les délégués ont fait appel à un avocat pour introduire un recours en justice. Au nom de l’obligation de transparence dans la procédure Renault, ils espèrent qu’un juge obligera le patron à produire le contrat entre Rhenus et Audi. Ils veulent connaître les indemnités que Rhenus a touché d’Audi pour la rupture du contrat avant terme et tenter d’exiger leur part. Plusieurs dizaines de travailleurs de Rhenus se sont cotisés pour payer l’avocat.

Le jugement devant être rendu le 25 mars, en attendant, les licenciements sont suspendus. Du coup, ce mercredi 19, la direction de Rhenus a soudainement décidé d’organiser un référendum pour ou contre le « plan social » en envoyant auparavant le calcul individuel de l’indemnité à chacun des travailleurs.

Avec ça, elle faisait planer la menace qu’au cas où une majorité « rejetterait » le plan social, il n’y aurait que les indemnités légales.

En envoyant ce chantage à des travailleurs plongés dans l’incertitude depuis neuf mois, payés par le chômage, souvent en retard et de façon incomplète, la direction de Rhenus espérait sans doute les faire craquer et rendre le procès caduc. Et visiblement, il n’y avait pas que la direction, les permanents syndicaux étaient aussi partie prenante du chantage.

À 10 heures, mercredi 19, une centaine de travailleurs de Rhenus s’étaient rassemblés devant le local loué par l’entreprise. La RH les appelait à entrer… sans succès. Ils voulaient d’abord écouter et poser des questions à l’avocat et aux délégués auxquels ils font confiance. Ce n’est qu’après avoir pris le temps d’écouter et de poser leurs questions que les travailleurs sont entrés.

Le directeur a essayé les blagues graveleuses qui font sa réputation, mais cette fois, personne n’avait envie de rigoler.

Des cris de « menteur !», « manipulateur ! » fusaient. Décontenancé, il ne trouvait plus ses mots devant le silence hostile de l’assemblée. Les travailleurs ne se sont pas gênés pour dire leur opinion.

Par la même occasion, ils réglaient leurs comptes avec le délégué FGTB qui s’oppose depuis le début à toutes leurs initiatives, ou qu’il ne rejoint que pour mieux saboter. Celui-ci a répété devant tout le monde que pour lui, il fallait accepter les propositions de la direction.

Après deux heures d’échan­ges animés, le directeur a finalement reculé et s’est dit prêt à reporter le référendum après le verdict du tribunal.

Rien n’est réglé et pour arracher des conditions vraiment meilleures, il faut un meilleur rapport de force. Mais en refusant d’entrer dans le piège du référendum, les travailleurs ont remporté une victoire morale !

Deux poids deux mesures !

Lors d’une dernière réunion entre la direction de Rhenus et les syndicats, les délégués avaient invité leur propre avocat. Il s’est vu refuser l’entrée.

Pourtant, la direction était venue de nombreuses fois accompagnée de conseillers et d’avocats.

Ce qui est possible pour les patrons, ne l’est pas pour les travailleurs ? Tout dépend du rapport de force !

De l’argent, il y en a, aussi chez Rhenus !

Le directeur de Rhenus s’est plaint que les représentants des travailleurs réclamaient un plan social de 20 millions d’euros, qu’il dit complètement irréaliste au vu de la situation de Rhenus Logistics.

En effet, pour 2023, Rhenus Logistics n’affiche qu’un bénéfice d’un petit million d’euros. Mais l’actionnaire principal de Rhenus, la famille Rethmann, est classée, avec 6 milliards, parmi les plus grandes fortunes d’Allemagne.

Un plan social de 20 millions, c’est 0,33% de cette fortune amassée sur le dos des travailleurs. Ils peuvent payer !