Les politiques au service des promoteurs immobiliers

Uplace, un projet d’un centre commercial à Bruxelles qui sera le plus grand du pays, a reçu un avis négatif de tous les secteurs de l’administration flamande : sa localisation, près du ring de Bruxelles, va aggraver la saturation du réseau routier parmi les plus engorgé d’Europe.

L’accroissement de particules fines dégagées par ce surcroît de trafic se traduira par une augmentation prévisible du nombre d’affections des voies respiratoires et des cancers pour la population de Machelen et Vilvoorde. La concurrence du centre provoquera inévitablement des faillites et des disparitions d’un nombre conséquent de petits et moyens commerces. Et pourtant, le gouvernement flamand a donné son accord !

Comme le fait remarquer l’économiste pro-libéral Paul De Grauwe, l’argent des autorités flamandes sera dépensé non pas pour construire les écoles dont la population a besoin, mais pour aider des promoteurs privés à construire un méga-centre commercial supplémentaire.

Et l’économiste explique que cette décision absurde « d’un monde qui tourne à l’envers (…) est le résultat de la proximité entre les décideurs politiques » flamands et les promoteurs immobiliers ». De Grauwe, qui connait bien ce petit monde, décrit comment ils se rencontrent dans les loges VIP des stades de football ou lors d’évènements mondains, comment ils nouent des liens et conclu ses affaires dans le plus grand mépris de la population.

 

« … et pour les Wallons, la même chose ! »

Et en Wallonie ? A Mons, « la Capitale Européenne de la Culture » a vu sa gare démolie pour faire place à un projet d’une nouvelle gare pour un montant estimé à 250 millions d’€. Un centre de congrès, un hôtel 4 étoiles, des ensembles d’appartements de standing sont en construction… dans la région la plus pauvre de Belgique.

Le bourgmestre Elio Di Rupo (PS) justifie ces dépenses en prétendant attirer des investisseurs et des familles un peu plus aisées qui viendront dépenser leur argent dans le magasin Ikea en construction « ce qui créera des emplois pour les moins qualifiés ». Viendront ? Viendront pas ?

En attendant, le Forem de Mons cherche déjà les candidats prêts à accepter un salaire de 1 200 € par mois pour 38 heures / semaines… samedi compris ! Il est vrai qu’il est plus facile de faire accepter de telles conditions alors que la réforme du chômage du gouvernement Di Rupo prive d’indemnités des milliers de chômeurs de la région.

A Charleroi, le bourgmestre Paul Magnette (PS) mène une politique similaire. Pendant qu’il court les salons immobiliers internationaux pour courtiser les promoteurs, sa police et son administration se livrent à une politique d’expulsion de la population pauvre du centre-ville.

Un règlement administratif interdit la mendicité à Charleroi 6 jours sur 7. Et selon l’asbl « Solidarité Nouvelles », 150 personnes auraient été expulsées de leur habitation depuis 2013, après l’intervention de la « cellule urbanisme-logement » de l’administration. Parce que ces logements sont insalubres ? Ne pourraient-ils pas être rénovés ? En tout cas les grues et les bétonneuses s’activent surtout pour la réalisation d’un « pôle commercial » de 35 000 m2, Rive Gauche, combinant commerces, bureaux, hôtels et appartements…

A Namur, le même groupe capitaliste qui a réalisé le « Centre des Grands Prés » à Mons s’est entendu avec le bourgmestre Maxime Prévôt sur la réalisation d’un centre commercial au square Léopold. Des habitants de la ville ont récoltés 12 000 signatures pour demander un référendum sur le sujet, et malgré une importante campagne médiatique menée par l’équipe du bourgmestre en faveur du projet, le « non » l’a largement emporté. « Mais, dit Maxime Prévot (CDH), ce n’est pas à la population mais aux élus de choisir », et le projet est maintenu.

Les pelles mécaniques qui font place nette dans les centre-ville, qui enlèvent des parcs, non pour construire les écoles ou les logements dont la population a besoin, mais pour édifier de luxueux centres commerciaux ; les pauvres sont chassés des villes, les chômeurs sont poussés vers le CPAS, les CPAS et les communes licencient leur personnel, les dirigeants politiques qui affichent leur indifférence face aux attentes et aux aspirations de la majorité… quel résumé saisissant de la domination du grand capital sur la vie politique et sociale !

Car ce sont de grands groupes capitalistes, représentant souvent les mêmes banques, les mêmes actionnaires qui manœuvrent pour soumettre ministres et bourgmestres à leur contrôle et faire avaliser leurs projets.

En Wallonie, est-ce que ces promoteurs immobiliers « rencontrent » les responsables politiques dans les loges luxueuses des stades de foot, « à la flamande », ou les particularismes locaux imposent-ils d’autres coutumes ? Au fond, ces politiciens flamands comme francophones qui ont divisé la population au nom de « ce que nous faisons nous-même, nous le faisons mieux », partagent la même soumission devant les privilèges et l’enrichissement démesuré de la classe capitaliste.