Une cinquantaine de grévistes tiennent un piquet. L’un d’eux reproche au gouvernement d’avoir dit « que les entreprises qui ont fait des bénéfices peuvent, si elles le souhaitent, accorder des primes. Mais bien sûr, les entreprises ne le souhaitent pas. Tout se joue au rapport de force. » L’objectif d’une prime de 250€, revendiquée par le front commun syndical, paraît insuffisant. « Mais, [dit l’un d’eux] il ne faut pas seulement calculer ce que la grève nous coûte et ce qu’elle nous rapporte. Il faut aussi défendre ses droits face au patron. »
La première action de grève, le 10 novembre, avait été très suivie à Ghislenghien : 85% de grévistes. La direction avait été prise au dépourvu. Mais en préparation de cette deuxième action, elle n’est pas restée les bras croisés.
Un accord d’entreprise impose aux travailleurs d’annoncer à l’avance leur intention de participer à une action de grève. Tous les travailleurs qui ont fait cette déclaration ont reçu la visite de leurs chefs, sur leur poste de travail, pour tenter de leur faire renoncer à participer à la grève. Les chefs ont tenu des assemblées en avançant des chiffres fantaisistes sur l’entreprise pour faire douter les travailleurs.
Mais ceux qui ont choisi la grève, malgré les pressions, avancent leurs propres chiffres. Les 300 travailleurs du dépôts préparent 300 000 colis par jour. 1 000 colis par personne, une tonne de manutention. Les cadences sont sans cesse revues à la hausse. En 2016, c’était 153 colis par heure par travailleur. On en est à 187 [1 colis toutes les 20 secondes !].
La direction prétend qu’il n’y a pas d’argent pour satisfaire les revendications des salariés. Mais, remarquent les grévistes « le groupe a de l’argent pour racheter les 57 magasins Match, il achète même des terres agricoles aux fermiers ». En effet. Jef Colruyt, dont le groupe détient près du tiers du marché de la distribution en Belgique, prévoit une augmentation des profits du groupe de 50% pour l’année fiscale 2023-2024.