Italie : une protestation populaire contre les conséquences sociales du confinement

A l’annonce des mesures de confinement prises par le gouverneur de la région de Campanie, vendredi 23 octobre, les travailleurs et les petits patrons des quartiers populaires de Naples ont manifesté leur colère.
Dans ces quartiers, le taux de chômage réel atteint presque le double du taux officiel de 25% pour la ville de Naples. Nombreux sont ceux qui, dans les restaurants, les cafés, les salles de sport, les cinémas, les commerces, vivent de petits boulots payés au noir, voire survivent uniquement grâce aux pourboires.

Lors de la première vague de la pandémie, et du premier confinement, ces travailleurs pauvres n’ont pas vu la couleur de l’aide gouvernementale promise et ont dû vivre sur leurs économies et sur l’entraide.

« Mais aujourd’hui, nous n’avons plus d’économies ! » s’exclament les manifestants. Sur les places, dans les rues, les manifestants organisaient des prises de paroles où chacun pouvait parler et exprimer ses préoccupations, ses aspirations. Les petits patrons protestaient contre les taxes, les charges, la perte de leurs revenus, et réclamaient de l’aide pour leurs corporations. Mais parmi ceux qui vivent des emplois précaires, s’exprimaient des idées plus générales, plus profondes. « On ne demande pas la charité. On ne veut pas les indemnités de chômage. On veut un travail et un salaire pour vivre et élever nos familles dans la dignité ! ».

« La dignité », cette protestation, cette exigence revient dans la bouche des hommes comme des femmes. Et elles refusent toutes de se laisser culpabiliser par le rebond de l’épidémie. « Le gouvernement, les médias nous accusent. Mais qu’est-ce qu’on y peut ? On ne contrôle rien, on ne dirige pas. On applique les recommandations. C’est le gouvernement qui a échoué à contenir l’épidémie. »

Parmi les manifestants, s’exprime la conscience qu’il faut réagir sans se laisser réduire au silence par le confinement. « Grands-pères, grand-mères, sortez tous, tous dans la rue ; c’est dans notre silence que commencent les dictatures ».
Les ouvriers de l’usine Whirlpool de Naples ont arrêté le travail pour exprimer leur soutien aux manifestants et se sont engagés depuis dans une grève contre l’annonce de la fermeture de leur usine.

Dans les jours suivants, les manifestations se sont répandues dans d’autres villes d’Italie comme une traînée de poudre : Rome, Vérone, Turin, Milan…

Les organisations syndicales italiennes n’ont pris aucune initiative pour appuyer et étendre ce mouvement aux entreprises. Mais dès le vendredi 30 octobre, elles relayaient les annonces du gouvernement Conte : prolongation du chômage Covid jusqu’en mars 2021, et même « interdiction provisoire des licenciements ». Les travailleurs italiens ont fait l’expérience des promesses de Conte : « Il nous a bien eu avec sa bonne mine la première fois. Mais il ne nous trompera pas une seconde fois ! » s’exclamait une manifestante. Et les ouvriers napolitains de Whirlpool vont vérifier rapidement ce que valent les annonces de Conte sur « l’interdiction des licenciements ».

Mais à travers ces premières réactions, les travailleurs de Naples et d’autres villes italiennes ont pu affirmer qu’ils ne se laisseraient pas acculer à la misère sans réagir, et c’est un signal important… à destination de tous les ouvriers.