Kris Peeters, ministre de l’emploi, veut, avant la fin de cette année, faire voter une loi qui permettrait aux entreprises d’expérimenter leurs propres règlements de travail qui peuvent déroger au droit du travail existant. C’est la porte ouverte à la disparition des dernières règles qui protègent un tant soit peu les travailleurs.
Parmi les points les plus importants du projet, il y a un nouveau statut de « travailleur autonome », un travailleur pas tout à fait indépendant, mais qui peut être licencié à tout moment, sans indemnité aucune, et qui serait payé en fonction du résultat livré et non plus en fonction des heures prestées. Autrement dit, le retour du salaire aux pièces. Peeters prétend que ce serait combattre la pratique des « faux indépendants », mais quel employeur se priverait d’user de ce statut au lieu d’embaucher un travailleur sous CDI ?!
Il voudrait lever les limitations de l’emploi d’intérimaires : plus d’obligation de CDI après 18 mois, plus de justification pour le recours à l’intérim. A côté de ça, une flexibilité accrue du temps de travail en fonction des carnets de commandes.
Le gouvernement s’apprête ainsi à satisfaire les revendications patronales sur toute la ligne, pour leur permettre d’intensifier l’exploitation. La mesure s’inspire de règlements déjà en vigueur dans des entreprises « innovantes » (quand il s’agit de trouver le moyen d’aggraver l’exploitation). Et de citer la flexibilité du temps de travail qui se pratique chez Audi à Bruxelles, avec le « compte +/- ». Un système qui permet à la direction de ne plus devoir accorder de congés et de sursalaire pour les heures supplémentaires. Ces heures vont sur un « compte temps » dans lequel le travailleur peut puiser. Mais surtout la direction peut à tout moment décider de faire tourner l’usine un samedi, ou de la fermer quelques jours, faisant diminuer l’épargne temps sur le compte.
En accordant encore plus de libertés aux entreprises de déroger au droit du travail existant, Peeters peut être sûr de disposer d’une source inépuisable d’inspirations qui permettront de détricoter le droit du travail très rapidement et de revenir 100 ans en arrière.
Mais cela montre aussi que le gouvernement et la législation suivent le rapport de force de la lutte des classes entre patrons et ouvriers. Et pour le moment ce rapport de force est en faveur du patronat qui s’appuie sur le chômage et l’absence de direction aux luttes des ouvriers. En effet, la flexibilité chez Audi, tant admirée par Peeters, a été imposée sous la menace de la fermeture de l’usine.
A chaque restructuration, à chaque fermeture, les dirigeants syndicaux ont accompagné ces attaques en évitant d’engager une lutte d’ensemble contre tous les licenciements. Ainsi, isolés, affaiblis, les travailleurs se sont chaque fois retrouvés acculés à accepter des reculs. Et Peters compte sur l’absence de réaction de la bureaucratie syndicale pour accompagner le détricotage du droit du travail, en amusant les dirigeants des syndicats dans de multiples négociations morcelées, entreprise par entreprise, secteur par secteur, où le patron peut à chaque fois menacer du chômage.
Mais c’est l’ensemble des travailleurs qui est attaqué, et c’est ensemble qu’il faut se défendre pour renverser le rapport de force en notre faveur. Les patrons ont un programme : tout faire pour maintenir et augmenter leurs profits, par des licenciements et en aggravant l’exploitation des travailleurs. Les travailleurs doivent avoir le leur : un vrai emploi et un vrai salaire pour tous, en prenant sur les profits ! Et pour cela il faut que renaisse un parti ouvrier qui ait l’ambition et la capacité de donner une direction résolue aux luttes des travailleurs.
C’est le chômage qui permet au patronat de devenir toujours plus exigeant. C’est pourquoi la première revendication des travailleurs conscients doit être l’interdiction des licenciements ! C’est la crise et il y a moins de travail ? Mais même dans les pires moments de crise, il y a encore du travail. Il faut le répartir entre tous, sans diminution des salaires. Et il y a des travaux qui seraient bien nécessaires : construire les logements sociaux qui manquent pour les centaines de milliers de mal logés et les réfugiés, réparer les routes et les tunnels, il manque des crèches, et plein d’autres choses encore. L’argent pour ce faire existe, mais il est distribué aujourd’hui aux banques spéculatrices, aux patrons licencieurs, aux plus riches qui peuvent frauder l’impôt.
Les travailleurs ont tout intérêt à se révolter contre ces absurdités. Et en ne comptant que sur leur propre détermination et leurs propres forces, les travailleurs ont les moyens de changer le rapport de force.