Les manifestations violemment réprimées au Congo ont sorti ce pays pour un instant de l’ombre de l’oubli médiatique dans lequel il est habituellement plongé.
L’actuel chef d’Etat Joseph Kabila essaie depuis des mois de contourner son obligation d’organiser de nouvelles élections. Ses rivaux qui veulent prendre sa place appellent à manifester.
Charles Michel, en tant que premier ministre de l’ancienne puissance coloniale du Congo se dit ainsi « vivement préoccupé » et appelle au « respect de l’Etat de droit. Lequel suppose (…) qu’il y ait des élections honnêtes (…) ».
L’Etat de droit ?! Le seul droit qui ait jamais existé au Congo depuis plus de 400 ans est celui des pillards et des exploiteurs !
Dès le 16ème siècle, les bourgeoisies européennes ont accumulé d’immenses fortunes avec le commerce des esclaves noirs. Ensuite, le Congo est devenu propriété privée de Léopold II en 1885, colonie de la Belgique en 1908. Beaucoup de grandes fortunes belges, à commencer par la famille royale, ont trouvé leur origine dans l’exploitation féroce des richesses du Congo : l’ivoire et le caoutchouc à la fin du 19ème siècle, l’huile de palme, les bois tropicaux et les minerais jusqu’à aujourd’hui. Les belles façades de Bruxelles n’existeraient pas sans le Congo que la bourgeoisie belge en collaboration avec les bourgeoisies des autres pays capitalistes, a saigné à blanc à coups de chicotte. Après l’indépendance en 1960, le gouvernement belge a soutenu Mobutu, un des pires dictateurs de l’Afrique, parce qu’il garantissait les intérêts des groupes capitalistes qui dominaient le Congo.
Le pillage du Congo est loin d’être fini et il n’a rien perdu de sa brutalité. Le Congo est le 7ème plus grand fournisseur de cuivre. Présent dans tous les câbles électriques du monde, il permet de faire rouler les trains, d’illuminer les villes. Mais au Congo, seulement 15% de la population a accès à l’électricité !
Le Congo fournit 80% du coltan du monde, un minerai rare présent dans tous les appareils d’électronique fine : GSM, tablettes, équipement de satellites… Ce sont des avancées technologiques extraordinaires. Mais dans le système capitaliste, ils s’accomplissent dans la plus grande barbarie. Les rivalités autour du coltan et autres minerais ont plongé l’Est du Congo dans une guerre d’une extrême brutalité entre une multitude de bandes armées qui terrorisent la population et qui a déjà fait plusieurs millions de morts.
Oh, les grands groupes à la pointe de ces technologies qui ont pignon sur rue – les Apple, Siemens, Samsung… –ne sont jamais impliquées directement, mais profitent largement du bas prix du coltan, extrait à main nue par des enfants !
L’Etat congolais n’est en mesure de contrôler qu’une toute petite partie des minerais, diamants, or, cuivre, coltan, manganèse, plomb… qui quittent le pays sans aucune taxe, sans apporter le moindre revenu à l’État.
Mais si aujourd’hui, les gens descendent dans la rue, c’est que la crise frappe aussi le Congo. Le ralentissement économique dans les pays riches diminue la demande en minerais et leurs prix baissent. Selon la presse africaine, depuis le début de l’année, 13 000 emplois auraient disparus dans le secteur minier au Congo où le taux de chômage officiel dépasse les 50%. Et cela ne sont que les emplois officiellement recensés. Pour les innombrables creuseurs à l’est du pays, leur sort s’aggrave au fur et à mesure que le prix du kilo de minerai baisse. Avec cela, le franc congolais se dévalue rapidement. Cela signifie que des millions de familles passent de la survie à la famine.
C’est ce même recul du secteur minier que le groupe Caterpillar invoque ici pour justifier la fermeture de son site de Gosselies. Certes, la misère des travailleurs ici, même au chômage, est sans commune mesure avec celle des masses laborieuses au Congo. Mais elle a la même cause : un système absurde et inhumain, où le profit de quelques-uns passe devant les intérêts de la majorité de la population.
La fabrication de bulldozers n’est peut-être plus intéressante pour les actionnaires de Caterpillar qui veulent voir leurs dividendes continuer d’augmenter, mais de telles machines manquent cruellement au Congo et ailleurs! Il y a des routes et des réseaux ferrés à construire, des fleuves à rendre navigables, des mines qu’on pourrait exploiter de façon plus sûre et plus humaine, pendant que les enfants vont à l’école ! Mais cela n’est pas assez rentable, cela ne les intéresse pas ! Alors ils ferment les usines et jettent les travailleurs à la rue.
Pour inverser la situation, pour produire ce que les populations ont besoin, il n’y a pas d’autre moyen que d’exproprier les capitalistes. C’est le seul moyen de les empêcher de ravager des régions entières et de détruire les usines dont l’humanité a encore besoin !