Grèce : les intérêts des banques et ceux des travailleurs

En Grèce, des élections législatives anticipées auront lieu le 25 janvier prochain. Aucun candidat président de la république n’a en effet été capable de réunir les 180 voix nécessaires au parlement. C’est là le résultat du discrédit des partis au pouvoir, conservateur et socialiste, face au mécontentement de la population.

Depuis le début de la crise, tous les gouvernements grecs ont fait payer très cher à la population le prétendu redressement des finances publiques. En moyenne, les salaires ont baissé de près d’un quart. Le chômage touche 27 % de la population et plus de 50 % des jeunes de 15 à 24 ans. Officiellement, plus du tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté. Et le salaire minimum, quand il est respecté, est gelé jusqu’en 2016 à 580 euros brut par mois.

Les gouvernements grecs sont sous la tutelle directe de ses usuriers représentés par la « Troïka » du Fonds monétaire international, de la Banque centrale européenne et de la Commission européenne. Sous prétexte d’aider la Grèce à rembourser sa dette, la Troïka a imposé une aggravation des politiques d’austérité. Les fonctionnaires partant en retraite ne sont plus remplacés et les coupes dans les budgets des services publics sont catastrophiques. Dans l’Éducation, la situation est telle que le ministre a proposé en novembre dernier que 1 100 postes soient occupés par des enseignants bénévoles avec la promesse que leurs noms seraient peut-être retenus lors de futurs réels recrutements. Le système de santé a été rejeté des années en arrière. De nombreux hôpitaux ont fermé et près de trois millions de personnes sont exclues du système de santé public.

Les classes populaires grecques sont de moins en moins prêtes à accepter tout cela sans broncher. Elles l’ont montré lors des journées de grèves et de manifestations nationales organisées par les syndicats des salariés du public et du privé, notamment celle du 27 novembre dernier. Et le mécontentement s’est aussi exprimé lors des élections européennes du printemps 2014. L’alliance électorale Syriza devenue un parti, qui se situe à gauche du parti socialiste et qui est dirigé par Alexis Tsipras, est arrivée en tête pour la première fois à un scrutin national.

La contestation croissante a fait s’effriter la coalition gouvernementale composé de la droite et du parti socialiste. D’autant plus que la Troïka a demandé la prolongation de sa tutelle sous prétexte que le budget 2015 ne la satisfaisait pas, en redemandant une nouvelle série de mesures impopulaires !

Dès l’annonce des élections législatives et la possibilité de voir élu un gouvernement qui sera peut-être un peu moins à sa botte, le FMI a suspendu son aide financière à la Grèce. Les déclarations des hauts responsables européens, dont le socialiste français Moscovici, sont allées dans le même sens : menaçantes à l’égard de la population grecque si elle « votait mal ». Les pouvoirs au service des banques et des milliardaires, craignent que le mécontentement en Grèce, même s’il ne s’exprimait pour le moment qu’électoralement, fasse tache d’huile dans d’autres pays. Car pour tous ces valets des puissances financières européennes et mondiales, la population doit accepter de se laisser dépouiller et se taire. La Grèce pourrait même être exclue du système monétaire européen.

Et c’est un signal que veulent donner aux populations les pouvoirs au service des banques et des milliardaires : ou vous acceptez l’austérité où on vous coupe les vivres !

Nombre d’électeurs espèrent que Tsipras, s’il arrive au pouvoir, prendra des mesures radicales pour redresser le niveau de vie des couches populaires. Mais rien n’est moins sûr. Tsipras cherche déjà à montrer son sens des responsabilités envers les capitalistes. Il ne parle plus de ne pas payer la dette mais de prolonger son remboursement. Il cherche à élargir sa coalition en se tournant vers des politiciens qui soutenaient le gouvernement, comme ceux du parti de la Gauche démocrate.

Alors, pour les classes populaires grecques, la seule garantie qu’un changement de politique s’opère dans le sens de leurs intérêts est qu’elles exercent elles-mêmes directement une pression sur le pouvoir, quel qu’il soit, par leurs mobilisations et derrière leurs propres revendications vitales.

Et ce qui est vrai pour la Grèce l’est aussi en Italie, en Espagne, au Portugal, en France et ici aussi. Il y a besoin d’une révolte, non seulement du peuple grec, mais de tous les peuples européens et de la planète pour mettre fin à cette politique capitaliste qui mène droit à la catastrophe sociale.