Gouvernement Arizona : une déclaration de guerre contre tous les travailleurs

Après sept mois de négociations, le gouvernement «Arizona», composé de la N-VA, du MR, des Engagés, de Vooruit et du CD&V vient d’être mis en place. Le premier ministre, Bart De Wever, annonce la couleur « Le voyage qui nous attend n’a rien d’une promenade de santé mais est plutôt de l’ordre d’un col hors catégorie ». Oui, le gouvernement Arizona est un gouvernement de guerre sociale contre tous les travailleurs. La prétention de défendre « ceux qui bossent » est mensongère et n’est là que pour justifier les attaques contre les pensions, les malades, les chômeurs, les immigrés, les allocataires sociaux, et donc, en augmentant la concurrence, contre les travailleurs ayant un emploi !

Pour préserver les profits des capitalistes malgré la crise, le gouvernement veut flexibiliser et précariser presque tous les emplois.

Les malades, les pensionnés, les chômeurs, les immigrés sont pointés comme responsables de la « situation budgétaire dramatique ». C’est en réalité un prétexte pour faire des dizaines de milliards d’euros d’économies sur leur dos chaque année.

Le gouvernement prépare aussi l’austérité dans les services utiles à la population comme à la SNCB (au moins 675 millions d’euros d’économie), dans l’enseignement, dans les soins de santé, …

Ces sommes serviront à verser de généreux cadeaux supplémentaires au patronat, à financer l’armée et à rembourser la dette aux banques.

La mise en œuvre de ce programme par la gouvernement n’est pas une fatalité. Le monde du travail peut encore se mobiliser largement et engager la lutte pour contraindre le gouvernement et le patronat à y renoncer !

Conditions de travail : retour vers le 19ème siècle

Depuis la campagne électorale, les partis de l’Arizona prétendent défendre ceux qui ont un emploi. En réalité, le gouvernement se prépare à détricoter les droits des travailleurs et à nous rejeter des dizaines d’années en arrière.

Ainsi le gouvernement veut lever tous les obstacles au travail de nuit ou du week-end et supprimer les primes et sur-salaires, à commencer par le secteur de la distribution, auxquels les travailleurs ont droit aujourd’hui !

La notion même d’horaires de travail serait évacuée. Les travailleurs devraient être appelables de manière « flexible » par l’employeur, selon son bon vouloir. A 6h un jour, à 10h le lendemain, sans vraiment de prévisibilité. Même le nombre d’heures travaillées par semaine pourrait changer avec « l’annualisation du temps de travail ». C’est-à-dire que le temps de travail serait calculé par année et non par semaine. A la guise des patrons, des semaines de 50 heures pourraient ainsi devenir monnaie courante. Comment organiser sa vie, s’occuper des enfants, se reposer quand on est ainsi à la disposition des patrons ?

Le gouvernement profite de la faiblesse des salaires pour tenter de généraliser les contrats précaires. Les flexi-jobs, ces contrats de misère que certains travailleurs ou pensionnés doivent prendre pour compléter leurs revenus, seront généralisés à tous les secteurs.

Même les enfants n’échappent pas à cette tendance ! Le gouvernement veut permettre que le travail étudiant commence dès quinze ans pour 650 heures de travail par an.

Pour ceux qui obtiennent enfin un contrat après des années d’intérim, ce serait le retour de la « période d’essai ». C’est-à-dire qu’au cours des six premiers mois de contrat, le patron pourrait licencier, avec un préavis d’une semaine seulement.

Et pour faciliter les licenciements, le gouvernement prévoit de plafonner les préavis des nouveaux contrats à 52 semaines.

Ce n’est pas tout. Si l’indexation n’est pour l’instant pas supprimée, le patronat le planifie, et demande aux directions syndicales et au patronat de leur préparer une proposition !

Chômage et CPAS : les boucs émissaires de la crise

Alors que les plans de licenciements et les restructurations s’accumulent, le gouvernement compte intensifier les mesures contre ceux qui ont perdu leur emploi. Les partis de gouvernement annonçaient créer “une différence de 500€ entre ceux qui ont un emploi et ceux qui n’en ont pas”? Ce serait 500€ en moins, et pire, pour les chômeurs et les allocataires sociaux! Le but du gouvernement est bien de leur faire vivre un cauchemar pour les forcer à accepter n’importe quel emploi mal payé, pour ensuite, par la concurrence entre travailleurs, faire pression à la baisse sur tous les salaires.

Le gouvernement prévoit de limiter l’assurance chômage à un an, et maximum deux ans, mais seulement après avoir travaillé cinq ans ! Cela s’accompagne en plus d’une dégressivité accélérée des allocations de chômage.

De ce fait, au moins 90.000 chômeurs risquent de se retrouver privés d’allocations. Une partie d’entre eux pourrait bénéficier du CPAS, mais ceux qui sont « cohabitants » seraient privés de toute allocation !

Mais les CPAS des communes pauvres sont déjà débordés ! Il est fréquent qu’une assistante sociale doive y gérer 200 dossiers. – ce qui est déjà infaisable ! Le gouvernement veut encore aggraver le manque de moyens en « responsabilisant financièrement » les CPAS qui ne remettent pas assez de personnes à l’emploi. Les CPAS des communes pauvres où le chômage est important perdraient encore davantage de subsides et se verraient plonger la tête sous l’eau.

Pour les allocataires du CPAS, le gouvernement généralise le flicage. D’abord, tous les bénéficiaires devraient s’engager dans un « PIIS » («projet individualisé d’intégration sociale»). C’est-à-dire que le versement de l’allocation serait fonction des conditions que vous impose l’administration et pourrait être coupée si vous ne respectez pas le PIIS aux yeux du CPAS.

Ce n’est pas tout. Le gouvernement instille en permanence la suspicion de fraude contre les bénéficiaires du CPAS. Ainsi, l’Arizona prévoit de créer une base de données avec tous les revenus et possessions des allocataires sociaux pour limiter encore les revenus qu’ils perçoivent.

Une telle base de données, c’est contre les familles milliardaires et les multinationales qu’il faudrait la mettre en place ! Ceux là, contrairement aux allocataires du CPAS, non seulement exploitent les travailleurs, mais contournent l’impôt, souvent frauduleusement, pour des montants qui se chiffrent en dizaine de milliards l

Cette coupe dans les allocations sociales serait aggravée par la réduction de « l’enveloppe bien-être » qui augmente légèrement les allocations et permet aujourd’hui à certains malades, chômeurs de ne pas complètement sombrer dans la misère.

Les contrôles seraient aussi renforcés contre ceux qui bénéficient d’une allocation chômage. En particulier contre les ouvriers des « secteurs en pénurie » : la construction, l’Horeca, le nettoyage, l’électricité, le transport de marchandises, l’agro-alimentaire, etc… pour les forcer à reprendre un emploi, sous le prétexte de lutter contre le travail au noir.

Malades de longue durée : travailler de force ou être exclu

En Belgique, plus de 500.000 travailleurs sont des malades de longue durée. Très nombreux sont ceux qui ont été cassés par le travail… , souffrant de troubles musculo-squelettiques, de dépression, de burn-out. Et les projets de flexibilisation du travail aggraveraient la situation en rendant le travail encore plus dangereux.

Le gouvernement veut surtout forcer des milliers de malades de longue durée à reprendre un emploi sous peine d’être exclu de toute aide sociale.

Cela commence dès la visite chez le médecin. Celui-ci ne délivrerait plus un « certificat d’incapacité » mais « un certificat d’aptitude » qui servirait à l’employeur à déterminer dans quelles fonctions vous pouvez encore travailler.

Tout au long d’une incapacité de travail, les sanctions tomberaient en permanence. Oublié de remplir un formulaire ? On vous coupe 10% de l’allocation. Vous ne vous présentez pas à un rendez-vous ? Suspension des indemnités. Et votre employeur pourra vous licencier au bout de six mois de maladie, au lieu de neuf aujourd’hui.

Même les médecins seraient suspectés de fraude. Le gouvernement prévoit de comparer le nombre de certificats par médecins dans chaque région, pour sanctionner ceux qui « en octroieraient trop ». Bien sûr, les employeurs sont invités à dénoncer les médecins « suspects » …

Pensions : travailler plus longtemps et gagner moins

Les précédents gouvernements avaient déjà reculé successivement l’âge de départ à la retraite. Le gouvernement Arizona prévoit de s’attaquer en particulier aux pensions des femmes et à celles des fonctionnaires. Mais plus largement, toutes les pensions seraient rabotées.

Tout d’abord, les accès à la pension minimum et à la pension anticipée seraient rendus bien plus difficiles car il faudrait désormais 156 jours de travail par an pour y avoir accès. Cela implique que les nombreux travailleurs mais surtout les travailleuses qui travaillent à temps partiel en seraient largement exclues car elles n’atteindraient pas le minimum requis de jours de travail.

Pour ceux qui partiraient à la pension de façon anticipée, le gouvernement impose un malus de 2% par année anticipée qui deviendra 4% par année en 2030 et 5% en 2040. Selon ces plans, une retraite anticipée de quatre ans équivaudra à 20% de perte de revenus !

Le gouvernement s’attaque aussi aux veuves. Leur pension de survie – qui permet aux veuves et veufs de bénéficier d’une allocation de survie après la perte de leur conjoint – serait supprimée deux ans après la mort de leur conjoint ! Ainsi, les nombreuses femmes qui s’occupent de leur famille toute leur vie seraient plongées dans la misère deux ans après le décès de leur conjoint.

Les pensions des fonctionnaires serait aussi largement rabotées. D’une part, les départs à la pension seraient retardés mais elles seraient aussi plus faibles car elles seraient désormais calculées sur base de l’ensemble de la carrière au lieu des dix meilleures années aujourd’hui, où le salaire est plus élevé.

Quant aux militaires, aux conducteurs de train et aux accompagnateurs, le régime de pension qui leur permet de partir plus tôt à la pension sera aussi supprimé. Ainsi, pour le personnel roulant de la SNCB, l’âge de la pension augmenterait d’un an… tous les ans, jusqu’à 67 ans.

Migrants : plus traqués pour être davantage exploités

Le gouvernement reprend les discours de l’extrême droite contre les migrants et se vante de faire « la politique d’asile la plus dure dans le cadre des règles européennes ». La vie des centaines de milliers de travailleurs étrangers, réfugiés ou sans-papier en Belgique serait rendue encore plus difficile.

Les migrants n’auraient plus accès à aucune aide sociale avant cinq ans sur le territoire et les places d’accueil seraient encore réduites. Même l’aide médicale d’urgence aux réfugiés serait restreinte, comme si les maladies ne se transmettent pas quels que soient nos papiers ! Pour cela, le gouvernement compter mettre sous pression les médecins et les pharmaciens.

Les expulsions de migrants seraient encore plus systématisées. Ainsi, les nombreux migrants qui sont passés par un autre pays européen avant d’arriver en Belgique seraient renvoyés dans ce pays pour y faire leur demande d’asile ou en être expulsés.

Pour expulser les réfugiés de Belgique ainsi que tous les déboutés du droit d’asile, le gouvernement prévoit d’ouvrir des centres spécialisés dans l’expulsion des migrants.

Plus généralement, le flicage des demandeurs d’asile sera généralisé. Les visites domiciliaires sont réinstaurées et la consultation de leur smartphone ou tablette sera systématisée durant leur procédure de demande d’asile.

Le gouvernement s’inspire aussi des régimes les plus répressifs en Europe en prévoyant d’emprisonner des réfugiés condamnés en Belgique dans des pays comme le Kosovo où les conditions de détention sont souvent encore pires qu’en Belgique.

Le regroupement familial – à savoir la possibilité de faire venir sa famille quand on est établi en Belgique – est rendu encore plus difficile.

Mais cette politique ne changera pas les arrivées de réfugiés en Belgique. Car les politiques répressives, pas plus que les murs et les barbelés n’arrêtent les migrations humaines.

Mais surtout parce que le patronat a besoin des travailleurs immigrés. Ils travaillent dans les hôpitaux, les chantiers, les usines, le nettoyage, l’agriculture. Ils font tourner, avec les autres travailleurs, toute la société.

Le statut précaire auquel ils sont soumis fait qu’ils sont contraints de travailler pour des salaires bien plus faibles et dans des conditions bien pires, ce qui fait pression sur tous les salaires.

C’est bien cela en réalité l’objectif du gouvernement et du patronat, diviser les travailleurs pour les affaiblir tous ! Pour les travailleurs, les travailleurs immigrés sont des frères de lutte dans le combat contre les capitalistes !

« Sécuritaire”: durcissement de la répression

La répression ne s’abat pas que sur les migrants. Contre les oppositions qui se manifestent déjà contre les plans du gouvernement, ce dernier prévoit de durcir la répression. Notamment en réinstaurant « l’interdiction de manifester » qui avait été proposée puis retirée par le précédent gouvernement. Plus largement, toute la politique pénale se durcirait. Notamment les « comparutions immédiates » seraient renforcées. Cela permet une condamnation et un emprisonnement à la va-vite des suspects.

Le gouvernement prévoit aussi de mettre en place la reconnaissance faciale dans l’espace public.

Bref, le gouvernement s’inspire des régimes les plus autoritaires. Vu le nombre de condamnations que cette politique engendrerait, le gouvernement prévoit la construction de nouvelles places de prison, voire d’envoyer des détenus à l’étranger. Mais tous ces outils répressifs ne règleront pas les problèmes d’insécurité et d’augmentation de la violence. Au contraire, cet arsenal répressif servirait à réprimer les grèves et les mouvements de révolte de la classe ouvrière lorsqu’elle défendra ses intérêts.

Armée: militarisation de toute la société

Le gouvernement Arizona prépare la militarisation de toute la société. L’austérité servira à alimenter le budget militaire qui passerait à 2% du PIB (au moins 11 milliards d’euros par an) d’ici 2029 et monterait jusqu’à 2,5% (au moins 13,75 milliards d’euros par an) en 2034.

Au-delà des dépenses faramineuses dans l’armement, c’est toute la société que le gouvernement veut entraîner dans la militarisation. La population est encouragée à rentrer dans l’armée de réserve et le gouvernement prévoit de créer un « service militaire volontaire » de douze mois pour les jeunes. Les options scolaires « défense» sont renforcées, de même que la présence de l’armée dans la vie sociale.

L’armée est évidemment aussi une manne pour les capitalistes. D’une part, le gouvernement veut vendre des entreprises publiques profitables ou des participations publiques (comme Belfius, Fortis, bpost, Proximus) aux capitalistes pour constituer un fond pour la Défense. D’autre part, tous ces achats militaires serviront à engraisser les capitalistes de l’armement en Belgique ou à l’étranger.

Les travailleurs doivent défendre leurs intérêts eux-mêmes !

Le programme de gouvernement est une déclaration de guerre de la bourgeoisie à tous les travailleurs. Seule une réponse collective de la classe ouvrière permettra de s’opposer à ce programme anti-ouvrier mais aussi à toute la vague de licenciements en cours.

Les directions syndicales ne proposent pas de plan de lutte sérieux contre ce gouvernement. Au mieux, comme les partis de gauche, leur perspective se réduit à un retour aux urnes. Cela ne peut mener qu’à ce que la gauche impose elle-même l’austérité.

Pour défendre leurs intérêts, les travailleurs doivent s’organiser. Pour s’opposer aux plans du gouvernement mais aussi s’attaquer au pouvoir des milliardaires qui mènent toute la société vers le chaos.