La FGTB veut attaquer en justice la limitation dans le temps des allocations de chômage prévue par le gouvernement fédéral en s’appuyant sur une interprétation de la loi. D’après Bodson, président de la FGTB : « pour exclure éventuellement les gens qui aujourd’hui sont au chômage depuis plus de deux ans, il faut leur donner un préavis de deux ans, et ça ne sera pas le cas puisqu’ils seront prévenus en juillet-août 2025 pour une exclusion cinq-six mois plus tard, en janvier 2026 ».
Utiliser les tribunaux n’est pas, en soi, une mauvaise idée. Les travailleurs ont intérêt à utiliser tous les moyens pour se défendre, y compris les lois bourgeoises. D’autant qu’il est parfois possible de gagner « en justice » dans des cas d’illégalité manifeste… Ce qui arrive parfois… les serviteurs du patronat, comme les politiciens des gouvernements ou les managers des entreprises, sont tellement bouffis d’arrogance, persuadés d’avoir tous les droits face aux travailleurs, qu’ils ont pris l’habitude de mépriser ouvertement leurs propres lois.
Si bien qu’il arrive que des juges donnent raison aux travailleurs ou aux syndicats qui se saisissent des tribunaux pour contester des mesures ouvertement illégales. À condition que ces juges ne subissent pas trop de pression eux-mêmes, en quels cas, eux aussi, sont près à fermer les yeux sur l’application de la loi.
Que les ministres et les représentants de l’autorité patronale se sentent à leur aise pour bafouer les droits légaux des travailleurs ne sort pas de nulle part. C’est l’expression de leur sentiment d’impunité dans une situation où ils imposent les intérêts des actionnaires sans rencontrer de véritable résistance de la classe ouvrière… Y compris parce que les directions syndicales font tout pour empêcher que les travailleurs parviennent à se défendre collectivement, comme on a pu le voir lors de la fermeture d’Audi à Bruxelles.
Même une victoire « en justice » contre la réforme des allocations de chômage n’accorderait encore qu’un délai. Après deux années, la réforme serait appliquée !
Aucun tribunal ne protège les travailleurs des attaques en cours ! Ni de l’exclusion des droits aux allocations de chômage, ni des licenciements, ni des baisses de salaires et dégradations des conditions de travail.
Pourtant il est inacceptable de se résoudre à les voir finalement appliquées ! Et non pas parce que cela enfreindrait la loi, mais parce que ce n’est pas aux travailleurs de payer le prix de la crise capitaliste, les dépenses d’armements et les intérêts de la dette de l’État !
C’est néanmoins ce qu’accepte Bodson dans ses déclarations, et, avec lui, l’ensemble des directions syndicales qui dispersent les grèves et les manifestations pour tenter de désamorcer le risque que naisse un véritable mouvement de lutte.
C’est d’ailleurs devenu tellement manifeste qu’un invité du journal patronal L’Écho déclarait vendredi 18 avril « (…) finalement les grèves c’est une forme de soupape sociale, qui n’est pas complètement malsaine ».
Mais en disant tout haut ce que beaucoup de patrons pensent tout bas, celui-là n’a en tête que les grèves pilotées par les directions syndicales, et pas celles qui sont dirigées par les travailleurs eux-mêmes ! Il sait que ces dernières sont beaucoup plus risquées pour lui et ses amis… car elles peuvent s’étendre entre la Wallonie et la Flandre! Ce qui a commencé à se produire lors des grèves des années 60-61, jusqu’à ce que les dirigeants de la FGTB trahissent au nom du nationalisme wallon pour y mettre un terme !
Alors dans le contexte actuel, il n’y aucune illusion à se faire : l’annonce de l’action en justice de la FGTB ne vise pas autre chose qu’à tromper une nouvelle fois les travailleurs, en comptant sur les tribunaux de la bourgeoisie plutôt que sur la mobilisation des travailleurs. Avec l’apparence d’une opposition aux réformes exigées par le patronat et les marchés financiers, les dirigeants syndicaux contribuent à les faire accepter.
Seul un très large mouvement de lutte peut permettre aux travailleurs de se défendre des attaques en cours. Un tel mouvement viendra des travailleurs eux-mêmes, pas des directions syndicales, sauf si le gouvernement s’en prenait à leurs intérêts d’appareils.
Alors la seule chose que les travailleurs peuvent attendre des actions en justice, c’est qu’elles ralentissent l’application des réformes du gouvernement, et leur donne ainsi un peu plus de temps pour construire un véritable mouvement de lutte !