Audi : un accord derrière le dos des travailleurs

Lundi 27 janvier, les permanents et délégués syndicaux d’Audi ont signé le plan des indemnités extra-légales proposé par la direction pour les 2.700 travailleurs sous contrat Audi. Les travailleurs n’ont même pas été consultés par leurs soi-disant représentants. Et les travailleurs en sous-traitance sont laissés seuls devant les patrons de ces entreprises.
Pour les travailleurs d’Audi, les montants additionnés aux indemnités légales sont grosso modo similaires aux montants payés lors de la restructuration en 2007, tenant compte d’une inflation cumulée d’environ 75%.
Mais cela ne fait pas de ce plan un plan « généreux », comme le prétend la direction, ni un plan « acceptable », voire « bien négocié » comme le prétendent les directions syndicales.
En 2007, les travailleurs avaient droit au chômage immédiatement. Aujourd’hui, ils doivent d’abord « manger leur indemnité légale ». Alors trois mois de préavis et peut-être 18.000 euros net (qui resteront de 35.000 euros brut), ça ne fait pas un matelas bien épais. Cela le fait d’autant moins que les licenciements pleuvent partout et que pour trouver un nouveau travail, il ne suffit pas de « traverser la rue »… D’autant moins que le futur gouvernement se prépare à limiter les allocations de chômage à deux ans.
A peu près 18.000 euros net, c’est ce qu’auront les travailleurs avec une ancienneté de 5 ans et moins. Avec 10 ans d’ancienneté, ce seront 28.000 euros net (55.000 euros brut). C’est très loin du prix d’une seule Q8, la voiture que produisaient les ouvriers à Forest et dont le prix de base est de 95.000 euros_!
Et déjà en 2007, les primes qualifiées alors d’ « historiques » par le délégué principal (qui a poursuivi sa carrière dans le département RH d’Audi), n’étaient pas un cadeau_: le plan était accompagné d’une intensification de l’exploitation importante, notamment 4 heures hebdomadaires données au patron avec le passage de 35 heures à 39 heures par semaine à salaire inchangé. Il y a eu la généralisation de l’intérim avec des CDI après 12 mois, puis 18 mois, puis 36 mois et une intensification des cadences difficilement chiffrable, mais qui use les tendons, les vertèbres et le mental des travailleurs, bien avant d’avoir atteint 5 ou 10 ans d’ancienneté! 2007, c’était aussi la création d’Autovision, une filiale à 100% dans les mains du groupe, mais où les salaires étaient 30% plus bas que chez Audi. Cette société implantée sur le site et chargée de la logistique et d’autres tâches auparavant accomplies par des travailleurs sous contrat VW, a depuis lors été remplacée par toute une succession d’autres sociétés sous-traitantes dont aujourd’hui DP World (Imperial), Rhenus, Mosolf, Plastic Omnium, et Sese Van Eupen. Et à chaque changement de contrat, l’exploitation a été intensifiée. Aujourd’hui, pour environ 1.000 travailleurs de ces sociétés, la procédure Renault n’est pas encore terminée, mais les montants mis sur la table par les diverses directions, sont de véritables insultes: 1.500 euros de « prime d’adieu » chez les uns, 550 euros (brut_!) par année d’ancienneté chez l’autre. Des dizaines de travailleurs restent mobilisés, car en plus de la question d’argent, c’est aussi une question de dignité! La crainte de la direction était que les travailleurs trouvent le chemin pour se défendre ensemble. Alors elle a toujours joué sur la division – entre CDI, intérimaires, sous-traitants, entre travailleurs jeunes et anciens… La crainte des actionnaires, des patrons et des ministres était aussi que la mobilisation et les actions des travailleurs de cette grande entreprise fassent tâche d’huile et mettent à l’ordre du jour la défense collective contre les licenciements pour les travailleurs de tous les secteurs. Les dirigeants d’Audi ont pu compter sur les dirigeants syndicaux, pour étouffer toutes les initiatives allant dans le sens de l’organisation et de l’amplification de la lutte. De même que les patrons, les dirigeants syndicaux craignent que les travailleurs gagnent en confiance dans leur force collective. Après tant d’années de reculs, la démoralisation parmi les travailleurs est telle que les tentatives de quelques dizaines de travailleurs n’étaient pas suffisantes pour passer par-dessus les limites syndicales. C’est cela qui doit changer! L’exploitation va s’aggraver. Les patrons ne feront aucun cadeau. Il faut que les travailleurs se préparent à défendre leur emploi, leur salaire, leurs conditions de travail. Et ce sont les patrons eux-mêmes, avec leur course au profit, qui déclencheront une large mobilisation des travailleurs.