Etienne Davignon, une vie au service du capitalisme

A 90 ans, le vicomte Etienne Davignon annonce sa retraite et la presse le célèbre comme « une icône du monde des affaires belges ». Le CV du vicomte est  intéressant en effet, mais pour des raisons que les dirigeants de ce monde préfèrent taire en public. 

Fils d’une famille de diplomates, aristocrates monarchistes et catholiques très anti-ouvriers… c’est au service du ministre socialiste Paul-Henri Spaak que Davignon commence sa carrière en juin 1960, lors de l’Indépendance du Congo. 

Au Congo, il assiste à l’organisation, par le gouvernement belge et les services secrets américains, du renversement et de la mise à mort du premier dirigeant du Congo indépendant, Patrice Lumumba. Trois ans plus tard, il dirige l’intervention des paras à Stanleyville, officiellement pour secourir des otages européens, en réalité pour écraser une rébellion contre les dirigeants congolais soumis à l’impérialisme belge et occidental. Le Congo est riche en ressources minières, dont le cuivre et l’uranium. Pour les gouvernements occidentaux, il n’est pas question de laisser ces richesses aux Congolais. Etienne Davignon sera du reste président de l’Union minière du Haut-Katanga (ancêtre de Umicore), un État dans l’État Congolais qui soutiendra la féroce dictature de Mobutu. 

En 1974, alors que la Belgique construit ses premières centrales nucléaires alimentées avec l’uranium congolais, Davignon devient le président de l’Agence internationale de l’Énergie, qui regroupe… tous les pays de l’Otan et l’Australie. Il s’agit d’assurer la sécurité d’approvisionnement en énergie des pays capitalistes à travers le contrôle du reste de la planète. 

A la même époque, il devient membre du club Bilderberg qu’il co-présidera ensuite de 1999 à 2011. Ce forum, créé en pleine guerre froide pour favoriser le rapprochement entre dirigeants américains et européens contre l’Union soviétique, rassemble chaque année « des dizaines de dirigeants, hommes d’affaires, politiciens de la majorité et de l’opposition et des journalistes » pour des débats sur lesquels chacun s’engage à la confidentialité. Le club Bilderberg prétend œuvrer à la défense de « la démocratie et du capitalisme », mais Henry Kissinger est le seul à pouvoir y dépasser le temps de parole. Sans doute parce que cet ancien secrétaire d’État américain, qui a organisé, entre autres, le coup d’État au Chili contre Salvatore Allende en 1973, a beaucoup de choses intéressantes à raconter sur la façon dont il faut utiliser la démocratie… ou bien la violence, dans la défense du capitalisme. 

Etienne Davignon a aussi été membre de Kissinger associates, un cabinet de consultance spécialisé dans les négociations entre les gouvernements et des multinationales comme Coca-Cola, Halliburton (fournitures aux armées), Lockheed-Martin (armements), Union Carbide (géant de la chimie responsable de la catastrophe de Bhopal en Inde)… 

Le reste de sa carrière, Etienne Davignon l’a passé à la direction de la Société générale, puis de Fortis, puis d’Engie, à qui il a pu faire profiter de son expertise du secteur de l’énergie et des réseaux d’influences gouvernementaux. Un monde où la domination des pays capitalistes se discute à coups de corruptions, de coups d’État, d’assassinats de chefs d’État, d’interventions armées…

Célébré dans les milieux du pouvoir, honoré de titres et de médailles par de nombreuses dictatures, le Vicomte Davignon est un digne échantillon de la classe capitaliste.