Derrière les scandales : le capitalisme

Des mandataires publics wallons démissionnent les uns après les autres suite au scandale Publifin qui dévoile tous les jours de nouveaux aspects scandaleux. Et les dirigeants de gouvernements et de partis de pousser des cris d’indignation avec le brio digne de grands acteurs de cinéma… au fur et à mesure qu’il leur devient impossible de cacher les pratiques douteuses qu’ils ont toléré pendant des années.

Que des mandataires publics soient payés des milliers ou des dizaines de milliers d’euros à ne rien faire, c’est choquant en effet. Choquant surtout parce que ces mêmes partis politiques organisent l’austérité pour la population laborieuse. Pour créer cette pléthore de mandats rémunérés chez Publifin, ils n’ont visiblement pas appliqué le même souci d’économie que lorsqu’il s’agit de faire des économies au détriment des besoins de la population. Ils se servent dans la caisse publique alors qu’ils suppriment l’allocation de chômage à des femmes avec enfants. Et pour ce qui est de la charge de travail de ces « administrateurs », la barre n’était visiblement pas placée à la même hauteur que pour les travailleurs à qui ils imposent toujours plus de productivité, dans le privé comme dans le public.

Alors les Di Rupo et les Magnette du PS, les Lutgen du CDH, tentent de limiter la casse pour leur image en jurant que les choses vont changer, qu’on prendra des mesures énergiques, voire « révolutionnaires »…

A défaut de convaincre, ils noient le poisson. Car sur le fond de l’affaire ils n’ont rien à redire. Cela ne les dérange pas de transformer une intercommunale en holding financier qui tire ses profits des prix élevés de l’énergie imposés à la population et de l’exploitation de ses travailleurs.

Di Rupo lui-même doit sa carrière politique aux privatisations de la Sabena, de la CGER devenue Fortis, des PTT devenus BPost et Proximus. La différence serait que ces privatisations-là se seraient passées dans les règles. Mais les actionnaires privés ont pu s’enrichir en pillant les biens publics non pas à hauteur de quelques dizaines de milliers d’euros, mais à hauteur de milliards. Et c’est tout aussi opaque.

Combien de milliards d’euros se sont évaporés avec la faillite de Fortis ou de la Sabena ? On ne le sait pas, car les entreprises sont protégées par le secret des affaires. Les électeurs, les travailleurs, la majorité de la population, ne sont pas censés savoir ce qui s’y passe, où vont les richesses que les travailleurs ont créées.

Voilà ce qu’est la « règle » dans cette société : une poignée de riches s’enrichit sur le dos de la majorité et jouit pour ce faire d’un droit au secret de ses affaires garanti par la loi.

Une règle respectée religieusement par tous les partis qui se relaient aux gouvernements. Car aucun n’a d’autre horizon que celui de la société capitaliste… et éventuellement des avantages qu’il peut en tirer. En servant cet ordre social injuste les politiciens soutiennent et protègent la grande bourgeoisie. Pourquoi se priveraient-ils de mentir à la population pour s’enrichir eux-mêmes alors que les capitalistes s’enrichissent à bien plus forte mesure? Ces laquais des patrons se rémunèrent avec les pourboires que les capitalistes veulent bien leur laisser prendre.

De telles pratiques choquent plus de la part du PS qui se prétend le représentant des travailleurs et des « petits gens ». Mais le PS n’en a pas le monopole, comme le montre l’affaire de Fillon, le candidat de la droite française aux élections présidentielles, qui aurait pourvu son épouse d’un emploi fictif rémunéré de plusieurs milliers d’euros mensuels.

Et si le MR, actuellement dans l’opposition en Wallonie, crie très fort contre les mandataires PS, il pense peut-être que le vacarme fera oublier que ses propres membres éminents ont rédigé des lois sur mesure pour un trafiquant d’armes milliardaire du Kazakhstan, en échange de services rendus pour des ventes d’armes françaises et des opportunités très alléchantes pour Tractebel lors de la vague des privatisations dans l’industrie de ce pays.

Alors non, tant que la classe capitaliste règne en maître sur la société, les affaires de détournement de fonds ne sont pas finies. Une minorité de riches qui s’enrichit démesurément par l’exploitation de la majorité a besoin de secret, besoin de mensonges. Elle a besoin de politiciens malhonnêtes et pas embarrassés de scrupules pour faire payer la population.

Alors nous faire croire qu’il suffit de changer les politiciens corrompus par d’autres politiciens, c’est nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Pour un fonctionnement honnête des affaires publiques, il faut changer les règles de la société. Et pour ça, la première chose serait de lever le secret des affaires et d’obliger les patrons à rendre des comptes !